Iwao Hakamada, âgé de 88 ans, a été acquitté jeudi 26 septembre par le Tribunal de Shizuoka lors de la révision de son procès. Après avoir passé 46 ans dans les couloirs de la mort au Japon, il détient un triste record : celui du détenu ayant passé le plus d’années dans l’attente de son exécution.
Les épaules voûtées, vêtu d’un gilet sans manche par dessus une chemise claire, et soutenu par sa femme, il descend les marches du tribunal. Son épouse, la tête haute exprime un profond soulagement. Lui, le regard perdu ne semble pas encore prendre pleinement conscience de sa liberté. C’est grâce à une longue bataille menée par ses proches et en particulier par sa sœur Hideko, qu’il obtient aujourd’hui justice. Le tribunal l’a acquitté faute de preuves suffisantes. Il juge que trois éléments l’incriminant ont même été fabriqués.
Ancien boxeur professionnel né en 1936, Hakamada a été condamné à mort en 1968. Il était accusé d’avoir assassiné son patron ainsi que sa femme et ses enfants. Il avait été arrêté en 1966, après deux cent quarante heures d’interrogatoire, il avoue les faits avant de se rétracter lors du procès, expliquant qu’il avait subi des violences physiques et morales. La justice japonaise le juge toutefois coupable. Condamné à mort deux ans plus tard, il reste 46 ans dans une cellule de 5m², comme le prévoit la procédure japonaise. Son dossier est révisé plusieurs fois mais le verdict ne varie pas.
Entre espoirs et désillusions
En 2007, des doutes sur sa culpabilité commencent à émerger parmi plusieurs professionnels de justice. Norimichi Kumamoto, chef du collège de trois juges qui avait initialement condamné Hakamada avoue avoir douté de sa culpabilité. En 2014, de nouvelles preuves créent un tournant décisif. Des analyses ADN révèlent que les traces retrouvées sur les vêtements supposés l’incriminer ne lui appartiennent pas. Cette révélation conduit à sa libération. Quatre ans plus tard, un recours du parquet entraîne l’annulation de cette décision remettant en cause de la fiabilité du test ADN. Hakamada reste cependant en liberté.
Après 56 ans d’incertitude, Iwao Hakamada est finalement acquitté. Cependant ces années dans le couloir de la mort l’ont profondément marqué. Isolé pendant près de cinq décennies, il souffre aujourd’hui de lourdes séquelles psychologiques, conséquences directes de cette interminable attente où chaque jour pouvait être le dernier.
Emma Trévin