Maxime Obinu devant ses outils 28 rue de la Treille, à Aix-en-Provence. V.S

Originaire de Salon-de-Provence, Maxime se forme au Québec à la réparation et à la fabrication d’instruments à cordes pincés. Guitariste et luthier, il travaille depuis janvier 2024 aux côtés de Florian, chez Deneuville Guitares, au 28 rue de la Treille, à Aix-en-Provence.

« J’aimais bien l’attrait du bois, les bonnes odeurs, les essences… Et j’étais guitariste, donc je me suis dit : trop bien, je vais mélanger les deux ! » Maxime Obinu, 29 ans, affiche une allure décontractée dans l’atelier dépôt-vente où il se rend chaque semaine depuis Lambesc. Avant de se tourner vers la lutherie, le musicien décroche un bac ES. Par la suite, il étudie un an à la faculté d’éco-gestion d’Avignon, puis de Montpellier. Mais l’expérience ne le convainc pas : « J’ai fait un petit burn-out, une remise en question. » Lors de stages en ébénisterie il se découvre une passion nouvelle : la lutherie. 

En 2018, Maxime prépare son dossier pour l’École nationale de lutherie au Québec. « L’immigration est assez longue : il y a des papiers à remplir, qui mettent des mois. » L’école est payante, mais grâce à un partenariat avec la France, Maxime ne débourse qu’environ 600 € par an. Beaucoup d’étudiants partent à l’étranger pour apprendre le métier : « il y a 40 à 50 % de Français dans cette école  » ajoute Maxime, devant ses outils. 

En 2021, après sa formation, le luthier rentre en France et travaille pendant deux ans à Plan-de-Campagne pour “Musique n°1”. Parallèlement, il contacte Florian et Guillaume, alors associés chez Deneuville Guitares. En mai 2024, Maxime remplace Guillaume, dans l’atelier aixois. Un atelier pour la qualité de ses instruments et son savoir-faire. 

La boutique chouchoute tous types d’instruments à cordes pincées. Banjos, mandolines, basses… Les deux partenaires  proposent fabrication, entretien, dépôt-vente et surtout restauration. « 90 % de notre boulot, c’est de la réparation et de l’entretien de guitare. » La durée du travail dépend de la complexité : « Pour cette tête de guitare cassée, c’est entre une heure si tout va bien, et trois à quatre heures s’il faut refaire des touches de vernis». Prix : entre 80 et 250 €.

Fabriquer une guitare de zéro prend du temps. « Une acoustique, c’est entre 200 et 300 heures. Une électrique, plutôt 80 à 100. » Plus rapide et plus rentable. Pourtant, « sur une acoustique vendue 3 000 €, on est à peine au-dessus du SMIC. » Le cœur des revenus reste la réparation, l’entretien et le dépôt-vente. « On prend 10 % de commission sur les guitares vendues pour nos clients, plus les frais de réparation. Sur une guitare à 6 000 €, ça fait 600 . C’est pas négligeable, mais on ne pourrait pas en vivre non plus. »

« Parfois, un client débarque en panique avant un concert »

La rentrée : une période intense pour Maxime « En septembre, on était à presque 80 réparations à deux  ! »  Pas question pour autant de refuser les clients . Seul atelier de lutherie pour guitares à Aix, le musicien gère aussi les urgences : « Parfois, un client débarque en panique avant un concert, alors que je bosse déjà sur deux instruments ». Sa plus grande frustration ? Les clients impatients. « Certains croient avoir priorité et ne comprennent pas que des réparations, comme les vernis, demandent du temps ».

Ce qu’il apprécie le plus dans ce métier varie selon l’humeur et  les projets :  « Il y a des restaurations super cool, d’autres pénibles et longues. Et la fabrication, c’est toujours un kiff». Maxime est un créatif qui s’épanouit dans le travail manuel. Ce qu’il aime c’est  « démarrer un projet, dessiner en 3D, imaginer tous les détails esthétiques, puis voir la guitare prendre forme ». La seule fausse note : « les vernis, ça me saoule : je ne maîtrise pas encore, j’essaie plein de techniques… mais ça va venir. »

La persévérance semble guider Maxime dans sa passion. Pour lui, la précision n’est pas un prérequis : « Ça s’apprend. (…) Tu fais des conneries, t’es pas assez précis, tu refais. » Passion et curiosité  prime : « Tu peux faire tout ce que tu veux tant que t’es passionné. Ça prendra plus ou moins de temps selon ta motivation et ton aisance manuelle, de ton poids de vie, de quand t’as grandi etc ».

Son conseil avant de se lancer dans le métier : « Bien y réfléchir, être sûr de son choix ». Devenir luthier demande un investissement sérieux, en temps et en argent. Il raconte que Florian, alors débutant, dormait dans son atelier pour économiser, travaillant 40 ou 50 heures à bas prix afin de se faire une clientèle. « Aujourd’hui, commencer de zéro est compliqué : il faut intégrer un atelier ou créer sa propre entreprise, et il y a peu de poste ».

Démarrer dans la lutherie demande des sacrifices, mais Maxime est parfois récompensé par les passionnés et les célébrités qu’il croise. Deneuville a vendu il y a 3 mois une guitare à Pascal Obispo. Habitué des clients célèbres, l’atelier reçoit aussi régulièrement Christophe Maé, Clara Luciani et même Alex Kapranos le chanteur de Franz Ferdinand !

Virginie Schadler 

L’atelier Deneuville Guitares fait aussi dépôt-vente.