L’idée est encore peu répandue en France pourtant le dispositif s’avère essentiel pour une partie de la population. Les « heures silencieuses » sont mises en place par certains supermarchés afin de faciliter le quotidien des personnes atteintes d’autisme.
Tout à coup, c’est le silence. Les haut-parleurs s’éteignent, les bruits des caisses se coupent et la lumière s’affaiblit. Le supermarché se plonge dans une heure silencieuse, initialement pensée pour la clientèle autiste.
Il s’agit d’un aménagement particulier, où l’intensité lumineuse et les ambiances sonores sont réduites dans les magasins alimentaires. De l’éclairage atténué, avec un seul néon sur trois allumé, aux haut-parleurs coupés, l’ambiance est alors « adoucie » pour éviter toute sensation de stress ou d’agressivité. Ce sentiment est expliqué par un membre d’Autisme France : « C’est une réalité trop peu connue. Faire ses courses dans des conditions ‘normales’ peut se présenter comme une véritable angoisse pour les autistes ».
Questionnée à la sortie du supermarché alors en heure silencieuse, Christiane s’exprime sur le dispositif. « La première fois que je m’en suis rendue compte, je me demandais bien pourquoi la lumière était si faible. Il neigeait dehors, alors j’ai pensé à un problème d’électricité ». C’est en se renseignant après du caissier que Christiane a appris l’existence de ce dispositif dans son supermarché.
« La mise en place des heures silencieuses est un effort très simple mais qui permet un confort considérable pour les personnes autistes », affirme l’association. Limiter toutes ces nuisances sensorielles leur assure un meilleur bien-être. Les courses se font alors plus sereinement pour les 700 000 personnes atteintes d’autisme en France.
De tels aménagements sont avant tout mis en place pour les autistes mais d’autres personnes y trouvent des avantages. Les personnes âgées, notamment celles atteintes de la maladie d’Alzheimer, ou plus généralement les clients vivant avec une déficience cognitive peuvent apprécier ces heures silencieuses. Comme en témoigne Christiane, « C’est appréciable, je trouve, d’avoir une lumière moins forte et moins de bruit dans les oreilles. On se sent moins agressés ». Les employés des supermarchés semblent aussi aimer ces périodes. « C’est un moment en plein milieu de la journée. Ça nous interpelle, la lumière se tamise en quelque sorte. J’ai l’impression que ça fait du bien à tout le monde ». En plus d’être appréciées par les autistes et par bien d’autres, les heures silencieuses offrent un autre avantage, écologique cette fois.
En France, les heures silencieuses sont encore peu répandues. Quelques actions similaires ont été portées, notamment en 2017 dans des magasins de jouets pour enfants. Les supermarchés français les plus avant-gardistes, et pour l’instant les seuls, sont ceux des enseignes « U ». Depuis le 2 décembre 2020, tous les magasins de la marque proposent ces heures calmes, chaque mardi entre 13h30 et 15h30. Les plus grandes surfaces de la marque proposent même d’autres créneaux dans la semaine. Les heures silencieuses ont fait l’objet d’une proposition de loi, portée par la députée MoDem du Cher Nadia Essayan en 2019. Ce 28 janvier 2021, l’Assemblée nationale a adopté en première lecture cette proposition. S’engagent alors 18 mois de dialogue et de concertation entre les parlementaires, les associations dédiées au handicap et les acteurs de la grande distribution. En réalité, le dispositif des heures silencieuses fait partie d’une proposition beaucoup plus vaste, incluant d’autres mesures d’accessibilité dans les grandes surfaces (priorité aux caisses, accès aux parkings …). Ces mesures devraient être mises en place au début de l’année 2022.
Outre-Manche, les Anglais proposent un dispositif encore plus poussé. Lors du « quiet time », les employés des supermarchés de la chaine Tesco sont plus nombreux dans les rayons, afin de proposé un service plus approprié à leur clientèle. Aussi, deux fois par semaines, certains de ces magasins proposent une « relaxed lane », une caisse où le rythme est plus lent. Il en est de même pour certaines chaines de supermarchés en Australie.
Lara Dubois