Depuis le 20 janvier 2021, les soldes d’hiver ont commencé. Mais cette année, près de 10% des commerces français ne proposent aucune promotion. C’est le cas de NUS, magasin de vêtements pour homme. Un phénomène nouveau qui incite à repenser les rapports entre le producteur et le consommateur.
Située dans le 17ème arrondissement de Paris, la boutique NUS semble à l’image des vêtements qu’elle propose : sobre, raffinée et élégante. A l’opposé des grandes enseignes, les habits ne sont pas entassés, les clients demeurent peu nombreux et un calme relatif règne. Les soldes ont débuté depuis près d’une semaine mais qu’importe, ici, on ne les pratique pas. Ces dernières semblent contraires à la politique de cette marque qui souhaite établir un lien de confiance avec ses clients. « Quand des entreprises se permettent de solder des articles à 50%, cela signifie que le reste de l’année, le prix est abusif » constate Clément, le co-responsable de la boutique. La ligne de conduite de NUS semble claire : fixer un prix juste. « On pourrait aussi vendre nos produits plus chers et faire des soldes, mais on privilégie une clarté et une transparence sur les prix ». Ces derniers correspondent véritablement à la valeur de l’article, d’autant que les coûts en marketing et communication n’ont pas d’impact. Cette pratique est facilitée par l’absence d’intermédiaire. Les marges peuvent paraître faibles mais elles sont uniquement accaparées par NUS.
Contrairement aux plus grosses marques, l’entreprise « dispose d’une flexibilité » qui lui permet de s’ajuster, de changer si besoin de business model. Malgré cette souplesse, l’objectif est d’installer une certaine cohérence : « ce n’est pas du tout l’idée de renouveler nos produits tous les quinze jours ». Le fait de proposer des vêtements uniques et intemporels justifie aisément l’absence de soldes. Les clients viennent pour acheter des habits de qualité. Ils « feront toujours une bonne affaire même en l’absence de promotion ». Cette idée est renforcée par la multiplication des opérations de promotion (black Friday, ventes privées…) qui ont démystifié les soldes, désormais moins attendues qu’auparavant. Elles sont mêmes devenues un symbole de surconsommation. Un client sur place confie que « les soldes dans les années 80 étaient excitantes ». Aujourd’hui, « elles n’ont plus de sens ». Il n’achète pas un produit pour sa réduction mais plutôt parce qu’il lui plait.
Les consommateurs semblent de plus en plus prêts à payer un prix équitable. L’exemple de NUS montre l’importance accordée à la qualité du produit, aux conditions de travail pour son élaboration, à la rémunération de la main d’œuvre et au respect de l’environnement. La marque se dit d’ailleurs concernée par ces enjeux écologiques et éthiques. Clément signale que la société « s’oriente de plus en plus vers le Made in France et tente de réduire progressivement son empreinte carbone ». Autant de bonnes intentions, proches d’être rattrapées par la crise actuelle. Depuis le début de la pandémie, les enseignes ont accumulé des stocks importants. Pour les épuiser, la tentation de se tourner vers de grosses promotions demeure réelle. Mais NUS n’a pas cédé. Ses principes et sa vision sur le long terme ont pris le dessus sur ces contraintes a priori passagères.
Raphaël Hazan