Le 24 au soir, la famille se réunit comme d’ordinaire autour d’une table bien décorée pour déguster des mets raffinés. Tout se déroule à merveille, les invités profitent de ce moment pour enfin se retrouver et oublier, le temps d’une soirée, que le monde s’est effondré. Un moment coupé en pleine lancée par une réaction allergique violente nécessitant un départ aux urgences.
L’arrivée en trombe de la voiture brisa le silence morose qui régnait sur le parking de l’hôpital. Louis et Fanny soutenaient, tant bien que mal, Fabienne qui se tordait dans tous les sens. Ils pressèrent la sonnette de la porte, laissant apparaitre un homme peut avenant. « C’est pour quoi ? » demanda-t-il d’un ton ennuyé. « Bon, je vais chercher une infirmière pour vous prendre la température ». La porte se referma, laissant les trois individus dans le froid glacial de l’hiver. Après des minutes, qui paraissaient des heures, la porte finit par se rouvrir. Une infirmière à l’air sec demanda à la « souffrante » de se tenir droit et de ne pas bouger pendant qu’elle plaçait le thermomètre sur son front. Elle sembla alors réaliser l’incapacité physique de se déplacer de Fabienne. Elle disparut pour aller chercher un fauteuil roulant, laissant les trois personnes, à nouveau seuls sur le parking. Le bruit des portes coulissantes se fit, une nouvelle fois entendre, et l’infirmière récupéra Fabienne pour l’emmener à l’intérieur. Louis et Fanny s’avancèrent pour la suivre mais se virent l’accès refuser pour cause de Covid. « Elle a oublié son portable, comment va-t-on faire pour la joindre ? » s’exclama Louis, anxieux. L’homme au visage toujours aussi fermé leur répondit « Vous n’avez qu’à contacter les urgences et demander son médecin ». Soit, ils attendirent. Le temps passait comme au ralenti quand soudain, une voiture débarqua à une vitesse folle et s’arrêta dans un dérapage assourdissant sur le parking. Un homme, la trentaine, sortit de l’habitacle, les yeux révulsés de colère. « Vous attendez ? » cria-t-il. « Moi je n’attends pas, ces salauds, je vais tous les tuer ». Il s’avança vers la porte d’entrée des ambulances pour essayer de rentrer, sans succès. Il se dirigea alors vers la porte principale et essaya d’ouvrir les portes coulissantes à la force de ses bras. Sa tentative fut cette fois, une réussite et il pénétra à l’intérieur, furieux, sans que personne ne l’arrête. Louis et Fanny était hébétée. Tout semblait irréel. L’attente devenait interminable et ils décidèrent de rentrer pour se reposer un peu. Vers 1h du matin, Louis réussi à joindre le médecin en charge de Fabienne. Ce dernier expliqua que sa femme avait été mise sous perfusion et qu’elle pourrait sortir dans le courant de la nuit. « On vous appellera dans quelques heures ». Deux heures plus tard, toujours aucune nouvelle. Louis, qui commençait à s’impatienter, rappela une énième fois l’hôpital. « Ah oui, votre femme est prête, on la prépare pour sortir » répondit un personnel de santé. Louis et Fanny s’empressèrent de prendre la route. Une fois arrivé sur le parking, devenu maintenant familier, ils furent surpris de trouver Fabienne, grelottant de froid. « Mais enfin, on leur a dit qu’on arrivait dans dix minutes ! Pourquoi est-ce qu’ils ne t’ont pas laissé au chaud ? » s’énerva Fanny. « Je ne savais pas, je n’ai eu aucune information depuis que je suis rentrée à l’intérieur ». Sur le trajet du retour, chacun échangeait sur ce qu’ils avaient vécu et leur stupeur face à l’organisation chaotique du service hospitalier. « Je ne comprends pas comment ils peuvent s’en sortir, c’est aberrant » argumenta Fabienne, qui commençait à peine à se réchauffer.
Après ce plein d’émotions, toute la famille se réunit dans le salon, épuisés mais heureux d’être à nouveau ensemble.
« Quelle drôle de soirée ! » s’exclame Fanny.
« Quelle drôle de vie ! » surenchérit Louis.
Fanny Bonfils