Conseiller départemental des Bouches-du-Rhône, Jean-Marc Perrin est aussi élu à l’Archéologie de la Ville d’Aix. Il nous livre aujourd’hui les dessous de ce vaste projet de réaménagement, qu’il mène conjointement avec le maire d’Aix.
Les fouilles préventives étaient-elles indispensables à la réalisation du chantier ?
« Ce chantier était important car nous avions une obligation de refaire ces trois places. Les diagnostics nous ont montré que certains réseaux situés sous les espaces de voierie étaient en piteux état. Maryse Joissains-Masini a donc décidé de se lancer dans ce chantier de près de 20 millions d’euros. Bien sûr, il faut faire face à de nombreuses contraintes, comme l’évacuation, la non utilisation des espaces publics, les problèmes avec les commerçants et riverains… Mais le chantier était nécessaire, d’autant plus que nous étions sûrs de trouver d’importants vestiges grâce aux fouilles préventives. Près de dix-huit siècles se trouvent sous nos pieds. Je tiens à répondre aux reproches qui nous ont été faits, à savoir que les fouilles ralentiraient le chantier : c’est faux et archi faux. Nous avons réalisé ces fouilles en parfaite coordination avec l’exécution du chantier : elles précèdent les travaux de chaque place. Aujourd’hui, nous n’avons aucun retard. Au contraire, nous avons un mois d’avance sur les deux ans et demi prévus. Les fouilles ne ralentissent donc pas le chantier, et permettent à la ville de démontrer son histoire et d’attirer du monde dans les commerces environnants. A l’occasion des journées du patrimoine les 16 et 17 septembre, les archéologues du pays d’Aix étaient présents, rassemblant 17 000 personnes sur le site. »
Qu’est-ce que les fouilles vous ont permis de découvrir ?
« Nous savions que nous trouverions les vestiges du palais comtal, mais les fouilles nous ont permis d’opérer une grande mise à jour. Sa construction a débuté au XIIIème siècle, puis a continué avec le roi René, avant qu’il ne soit détruit une quinzaine d’années avant la révolution pour le projet de réaménagement de Claude Nicolas Ledoux*… Les vestiges nous ont appris qu’à l’époque on faisait du réemploi de matériaux, le palais comtal ayant été fondé sur des bases antiques. Pour la période médiévale, des pierres de la cité antique ont été récupérées pour les nouvelles fondations. Sur la place des Prêcheurs, près de l’église, on a découvert un cimetière avec des ossements de différentes époques. Tous les éléments clefs ont été récupérés et analysés dans un niveau d’études qui nous permet de connaître les contours du palais comtal. Avec les différentes couches nous on en sait davantage sur la période allant du Ier-IIème siècles au XVIIIème siècle. Désormais, nous en savons davantage sur le cœur historique le plus riche d’Aix, avec le palais comtal, le mausolée, les tours romaines. »
Comment comptez-vous mettre en valeur ce qui a été découvert ?
« La Ville d’Aix a un centre d’études et de conservation, un laboratoire avec un entrepôt qui nous permet d’étudier et de conserver les ossements, pierres et objets trouvés. Une étude est en cours pour poser des dallages vitrés sur les vestiges du palais comtal, avec des éclairages et des systèmes de ventilation. Référence en la matière, l’archéologue Nùria Nin sélectionne actuellement les lieux les plus symboliques et pertinents du site. Forcément, lorsque vous préservez un endroit pour son patrimoine, vous condamnez son utilisation publique. Les commerces et marchés ne pourront donc pas s’installer à cet endroit. Mais la demande de conservation reste forte. Il faut satisfaire tout le monde, et je pense qu’on y arrivera. »
Jules BEDO, Maxime CHEHADE, Mélissa HENRY, Mathilde LOPEZ, Marine MARDELLAT, Alexandre REYNAUD