Grand chantier annoncé par Emmanuel Macron dès la campagne présidentielle, les cinq ordonnances réformant le Code du travail ont été signées par le Président de la République ce 22 septembre. Encensées ou décriées, ces 36 mesures font débat. Outre les indemnités prud’homales ou la négociation au sein de l’entreprise, les conséquences sur l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes posent également question.
Dans une interview pour Europe 1 le 29 mai 2017, Marlène Schiappa, secrétaire d’Etat chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes, affirmait l’importance de placer la protection des femmes au cœur de la réforme du Code du travail. Cette volonté s’inscrit dans une ligne de conduite générale: l’égalité homme-femme étant annoncée comme «la grande cause du quinquennat» par Emmanuel Macron. C’est dans ce cadre que la réforme n’a aucune incidence sur le congé maternité, ou conserve l’égalité professionnelle comme une prérogative de branche.
Pourtant, cette réforme pourrait entraîner une réalité totalement différente. C’est en tous cas l’avis de nombreuses associations féministes, syndicats, ou encore partis politiques. A travers une tribune publiée sur Mediapart le 6 septembre, ces dernières alertent sur les conséquences de cette réforme pour les femmes. Regrettant déjà l’absence d’un ministère dédié aux droits de la femme, ou de la parité au sein du gouvernement, la réforme du travail constitue pour eux un troisième manquement du Président de la République à son engagement en faveur de la cause féminine.
Ils dénoncent ainsi une réforme en apparence neutre, mais qui en réalité mettrait en danger l’égalité salariale. Cette dernière est déjà largement imparfaite: l’écart de salaire entre les deux sexes culmine actuellement à 26%. Au cœur des inquiétudes, la partielle inversion de la hiérarchie des normes: en renvoyant la négociation au sein de l’entreprise, où le rapport de force est moins favorable aux salariés. De nombreuses femmes risquent alors d’être touchées en priorité à propos des accords concernant les droits familiaux: la protection de la femme enceinte par exemple.
Plus directement, la tribune évoque également le droit d’expertise consacré à l’égalité entre les hommes et les femmes, qui sera désormais co-financé par le comité d’entreprise, et non plus uniquement par l’employeur. Une mesure qui, faute de moyens financiers, pourrait entraîner un renoncement à cette expertise. Dans le même sens, l’entreprise ne sera plus juridiquement contrainte de fournir un certain nombre de données sur ces inégalités à leurs salariés.
Ces potentielles conséquences apparaissent comme des effets induits de la réforme. Ils pourraient cependant être évités. Comme dans de nombreux autres domaines, il convient donc d’œuvrer dans le sens d’une égalité toujours accrue, en poursuivant la voie ouverte par la loi Roudy de 1983, première loi sur l’égalité professionnelle.
Marie Gendra