@Mathilde Sanchez Garcin
Alors que l’exécutif multiplie depuis des semaines les réunions sur le sujet avec ses partenaires européens, le Président de la République s’est déjà entretenu par téléphone avec ses homologues russe, ukrainien et américain. C’est en personne qu’il rencontrait Vladimir Poutine à Moscou (Russie) et Volodymyr Zelensky à Kiev (Ukraine), en ce début de semaine, pour tenter de parvenir à un apaisement.
Les tensions entre l’Ukraine et la Russie, au point mort après huit ans de combats, ont été ravivées il y a quelques semaines. Depuis fin 2021, les Occidentaux accusent Moscou de masser des dizaines de milliers de soldats aux frontières de l’Ukraine, en vue d’une potentielle invasion. Un acte qui aurait entraîné l’une des pires crises russo-occidentales depuis la Guerre Froide. Ces derniers jours encore, les tensions sont vives. Washington a assuré, jeudi 3 février, détenir des preuves que les Russes préparaient une vidéo de fausse attaque ukrainienne pour prétexter une invasion. La veille, les Américains annonçaient l’envoi de 3000 soldats supplémentaires en Europe de l’Est, se faisant accuser de « nourrir les tensions ». En niant toute agressivité, la Russie a conditionné une « désescalade » de la crise à la fin de la politique d’élargissement de l’OTAN, notamment à l’Ukraine. Moscou exige également le retrait de l’Europe de l’Est, des capacités militaires de l’Alliance atlantique. Des exigences rejetées par la présidence américaine qui a proposé, en échange, que les rivaux ne déploient pas de moyens militaires offensifs en Ukraine.
Une médiation menée par la France
Ces dernières semaines, la présidence française multiplie les consultations téléphoniques avec ses homologues russe, ukrainien et américain. « La priorité pour moi sur la question ukrainienne et sur le dialogue avec la Russie, est une sortie de crise qui passe par la capacité à avancer sur les bases de l’accord de Minsk » a indiqué Emmanuel Macron devant la presse, mercredi 2 février. À la fin du mois de janvier, il avait cependant affirmé qu’une invasion de l’Ukraine par les Russes entraînerait une « riposte » et « des conséquences très lourdes ». Jeudi 3 février, le chef d’État s’entretenait une nouvelle fois au téléphone avec Vladimir Poutine. Pour leur troisième conversation téléphonique de la semaine, les deux présidents ont discuté des « garanties de sécurité » exigées par Moscou, en évoquant une « accélération » du processus de paix en Ukraine.
En début de semaine, Emmanuel Macron rencontrait en personne les présidents russe et ukrainien. Des entretiens qui se sont déroulés en tête-à-tête mais « en coordination avec les partenaires européens » consultés au préalable par le chef d’État français. Lundi 7 février, il a échangé pendant plusieurs heures avec Vladimir Poutine pour obtenir des garanties concernant une désescalade des tensions. Si le président français s’est dit satisfait de son échange avec le président russe, il n’a pour autant pas obtenu d’engagement sur le retrait des troupes à la frontière ukrainienne. Vladimir Poutine a cependant laissé entrevoir un début de négociations sur la situation. Le lendemain, Emmanuel Macron rencontrait Volodymyr Zelensky pour lui réitérer son soutien en assurant « la France est déterminée à poursuivre inlassablement ses efforts de médiation entre la Russie et l’Ukraine pour mettre fin au conflit ».
Dans la soirée, Olaf Scholz recevait les présidents français et polonais. Un échange lors duquel, France, Allemagne et Pologne ont affiché leur objectif commun et leur unité pour empêcher la guerre « par la diplomatie et par des messages clairs, ainsi que la volonté commune d’agir ensemble » a assuré le chancelier allemand.
Un multilatéralisme à la française
Ce marathon diplomatique représente un effort de la part de la France pour tenter de résoudre le conflit qui menace l’Est de l’Europe. Des questions restent toutefois en suspend sur l’efficacité de cette médiation et sur la fin de cette guerre. À ce titre, Gabriel Attal, porte-parole du Gouvernement, s’est exprimé devant la presse vendredi 4 février, trois jours avant le déplacement du Président. « La France a vocation à être leader, a vocation à avoir un rôle pivot dans le multilatéralisme, dans les efforts pour la désescalade ». L’occasion pour Emmanuel Macron d’affirmer sa posture internationale en tant que chef de guerre et de se placer au-dessus de la mêlée électorale, à moins de trois mois du premier tour. Le Président de la République apparaît en effet très engagé dans la résolution du conflit, mettant en avant la responsabilité qui incombe à la France en tant que présidente de l’Union européenne jusqu’au 30 juin 2022. Bien que l’UE se soit peu impliquée lors des premières discussions russo-américaines, il semble effectivement que le chef d’État tente de replacer l’Europe dans le jeu, prônant depuis des années, son « autonomie stratégique ».