Le 23 juin 2015, l’homme d’affaire Ye Chulin a créé la marque chinoise « Calissons d’Aix ». Comment a-t-il pu légalement créer une contrefaçon du célèbre produit aixois, et quelles sont les conséquences pour les calissoniers provençaux ?
Le calisson d’Aix-en-Provence est victime de sa popularité à l’étranger. Cet emblème gourmand de la Provence a trouvé un concurrent à sa hauteur : le calisson chinois, ou « Kalisong ». Un homme d’affaire vient en effet de déposer la marque « Calissons d’Aix » auprès de l’équivalent chinois de l’INPI (Institut national de la propriété industrielle).
« La Chine est un pays où le premier qui dépose une marque se voit octroyer une protection », a-t-on expliqué à la Chambre de commerce de l’Union européenne à Pékin. En d’autres termes, si la procédure est bien actée en août, les calissoniers provençaux ne pourront plus vendre leurs propres calissons en Chine. Et ce, jusqu’en 2026.
En France, la célèbre confiserie est protégée par l’Union des fabricants de calissons d’Aix (UFCA) depuis 1991. Une compagnie étrangère ne peut pas vendre une confiserie du même type sur le territoire national. Mais ailleurs, si. La protection à l’échelle internationale aurait nécessité la création d’une Indication Géographique Protégée (IGP), mais les tensions entre calissonniers avaient jusque-là ralenti la procédure.
Comble de l’histoire, ils avaient prévu de déposer ce dossier d’IGP avant le 25 novembre … pour une obtention en 2018. Alors, pour se protéger dès maintenant, l’UFAC a déposé un recours avec l’aide d’un cabinet d’avocats spécialisés dans la propriété commerciale.
« Je ne trouve pas la démarche très honnête, sachant que nous avons accueilli des spécialistes du tourisme chinois dans l’un de nos ateliers », a protesté la boutique Roy René située sur l’avenue Gaston de Saporta. C’est en l’occurrence ce que lui ont reproché les autres artisans aixois. Pointée du doigt, la confiserie a pourtant assuré que le dépôt de la marque était antérieur à la visite. L’entreprise Roy René est le premier producteur du calisson. Elle écoule 9% de sa production à l’étranger, et la perte du marché chinois pourrait avoir une incidence notable sur son chiffre d’affaire. « Nous croisons les doigts. Nous plaçons beaucoup d’espoir dans le recours déposé », a affirmé la gérante de la confiserie.
Pour le moment, aucun « Kalisong » n’a encore été produit. Pourtant, il y a fort à parier qu’il induirait en erreur les consommateurs non avertis. L’affaire reste donc à suivre… En espérant qu’elle ne connaisse pas la même fin que les savons de Marseille, dont certains sont désormais fabriqués en Asie … non pas à partir d’huile d’olive, mais de graisse animale.
Léa Cesses