Chaque mardi et jeudi soir, les amphithéâtres de la faculté de droit d’Aix-en-Provence reprennent vie. Une vingtaine d’étudiants se retrouvent pour s’exercer à l’art oratoire, sous la houlette du Lab’oratoire, une association qui place la parole au cœur de la formation juridique.

L’éloquence aixoise perdra-t-elle de sa superbe ? Il est un peu plus de 19 heures. Dans un amphithéâtre qui se remplit, les premiers arrivés échangent quelques mots avant de s’installer sur les bancs en bois. Ce soir, pas de cours magistral. L’ambiance est détendue, mais concentrée. L’éloquence, ici, se pratique, se vit mais surtout se partage.

Lou Dagnac, ancienne étudiante en droit à Aix et désormais présidente du Lab’oratoire, anime des séances aux cotés de doctorants comme Raphaël Maillé et Grégoire Cabantous ou encore d’actuels étudiants en dernière année comme Lugi Aklik. Elle sourit : « Le but n’est pas de faire un cours. Après une courte introduction, on passe tout de suite à la pratique ». Les exercices s’enchaînent : improviser sur un thème donné, défendre un point de vue absurde, ou encore simplifier une idée complexe. « On essaie d’apprendre à s’exprimer devant tout le monde ».

Créé il y a quatre ans par deux doctorants (Pierre Bon et Lylian Denis), le Lab’oratoire est devenu une institution. « Au départ, on était leurs élèves. Quand ils ont terminé leurs thèses, on a pris la relève ». Aujourd’hui, l’association compte une quinzaine d’habitués, mais les curieux sont nombreux à découvrir la discipline. Les séances ont lieu deux fois par semaine, de 19 h à 20 h 30, dans les amphithéâtres de la faculté. « Après 19 h, les gens n’ont plus envie d’assister à un vrai cours », sourit la présidente.

Le Lab’oratoire propose un large éventail de thématiques : de la rhétorique classique aux débats plus littéraires ou politiques. L’association réunit surtout des étudiants de licence 3, mais aussi des premières et deuxièmes années. « On veut rendre simple quelque chose de compliqué ». Une philosophie qui guide chaque exercice.

Parmi les intervenants, on retrouve d’anciens membres de l’association : certains préparent des concours, d’autres travaillent sur leurs thèses. « On est assez autonomes, et la faculté nous soutient à 1000 % ».

La ville d’Aix, attachée à sa tradition juridique, semble prête à faire évoluer ses pratiques. Le Lab’oratoire aimerait prochainement organiser un concours d’éloquence avec Sciences Po Aix : « Ce serait l’occasion de confronter nos styles et nos méthodes ».

Un nouveau concours d’éloquence en 2026

Cette année, l’art oratoire franchit une nouvelle étape à la faculté avec l’arrivée du concours Lysias. Pour la première fois, Aix-en-Provence accueillera sa propre édition locale. Maxime Giacoletto, étudiant en master 2 et membre de l’Institut Portalis, fait partie des organisateurs. « Une amie, secrétaire générale de la conférence Lysias, m’a fait remarquer qu’il n’y avait pas de filière à Aix. Alors on s’est lancés ».

Créé en 1992, Lysias existe dans presque toutes les facultés de droit de France. À Aix, les épreuves se dérouleront en janvier, sur trois mercredis. Les plaidoiries civiles seront réservées aux L1, les pénales aux L2, et l’éloquence pure aux L3 et aux masters. Le jury rassemblera doctorants, avocats du barreau d’Aix et, peut-être, le bâtonnier.

Le succès a été immédiat : « On a bloqué les inscriptions à 24 participants par catégorie, et on a tout rempli en deux jours ! ». Les lauréats iront défendre les couleurs d’Aix lors de la grande finale nationale.

Pour lui, l’objectif est clair : « On veut que le concours s’installe durablement à Aix »… Nul doute que la tradition oratoire n’est pas prête de perdre de sa superbe à Aix-en-Provence. 

Marius Linarès

Comptes Instagram : @laboratoireaix / @lysias.aix