Conséquence d’une recherche de nouveaux moyens de déplacement en ville et de la pratique d’une activité physique sans contrainte sanitaire, le vélo est redevenu à la mode depuis 2020. Simple évolution circonstancielle, ou véritable prise de conscience ? Nous sommes montés en selle pour en savoir plus.  

Au pied de la Gineste, les quadriceps picotent dès les premiers hectomètres. Col connu et reconnu, il est notamment le théâtre de la mythique course à pied Marseille-Cassis au mois d’octobre, et un passage redouté, y compris des cyclistes professionnels. Chaque week-end, il accueille surtout des joggeurs et cyclistes amateurs, venus se mesurer aux 5% de dénivelé moyen qui s’étirent sur plus de 5km. Ils sont chaque week-end de plus en plus nombreux. Guillaume le ressent. S’il s’adonne à cette pratique seulement depuis le premier confinement, « car il fallait se trouver une occupation pour ne pas devenir fou », le Marseillais a remarqué une hausse notable de la fréquentation des pistes cyclables. « C’est une maladie qui se transmet », lance-t-il en souriant, avant de produire son dernier effort pour parvenir au sommet du col. À force de pratique, il a attiré la curiosité de ses amis, qui voyaient là l’occasion de passer un bon moment en groupe tout en conservant une certaine distanciation, imposée par la pandémie de COVID-19. « Les terrains de football sont pour la plupart fermés, on ne sort plus dans les bars le week-end. Il y a donc un trop plein d’énergie à évacuer, et il faut faire preuve d’inventivité pour pouvoir se réunir sans enfreindre les règles liées au Covid », résume-t-il lorsque le petit peloton réalise une halte pour se rafraîchir. 
Et ils ne sont pas seuls. Selon une étude de l’observatoire de l’association de collectivités « Vélo & Territoires », la fréquentation a progressé de 10 % en 2020 par rapport à l’année précédente. Un pic de 27 % a même été observé entre les deux confinements. 

« Peur des transports en commun »

En plus de ses sorties du week-end, Guillaume troque sa tenue de sport pour un jean et utilise son vélo en ville, notamment pour ses trajets courts. Un choix économique, mais pas que. « Quand mon scooter est tombé en panne, j’ai dû chercher une solution », confie le jeune homme de 24 ans. « J’étudiais à Paris, j’avais l’habitude des transports en commun, mais depuis que je suis rentré à Marseille, entre la peur globale des transports en commun liée au COVID et la mauvaise desserte de certains quartiers, pour moi, c’était niet ». Très vite, son vélo apparaît comme l’alternative évidente. « Je me déplace plutôt facilement, surtout que mes principaux trajets sont concentrés. Même si la ville n’est pas au top niveau piste cyclable ». C’est peu dire. Si l’on note l’émergence de nouvelles zones cyclables, la capitale des Bouches-du-Rhône était encore en 2020 classée dernière du Baromètre national des Villes Cyclables de plus de 200.000 habitants. Une anomalie au regard des autres métropoles françaises et européennes.

Cependant, l’embellie à l’échelle nationale peut-elle se prolonger à terme, même hors crise sanitaire ? « Il faut que les mentalités évoluent », analyse Guillaume, pointant du doigt les comportements, mais aussi les politiques en vigueur « L’État a mis en place plusieurs choses intéressantes comme la prise en charge de réparation pour les vélos à hauteur de 50 euros, dont tout le monde peut bénéficier. Mais ça n’a pas toujours l’impact espéré, les gens entendent trop peu souvent ce type d’information et se résignent parfois à se tourner vers d’autres solutions », regrette-t-il.
Une concertation entre les différentes instances devra cependant être réalisée pour éviter un nouveau flop, à l’image des « corona-pistes ». Mises en place de manière précipitée et à grand frais l’an dernier à Marseille, le résultat a été catastrophique et entraîné une suppression de la piste au bout de 5 jours d’utilisation seulement. 

L.K