Le nombre de blessures dans le monde du football est anormalement élevé. Fragilité physique ou rythme effréné : comment expliquer ce fléau ? 

Marquinhos, Joao Felix, Jack Grealish, Lewandowski tous ont subit une grosse blessure cette saison. Pour le journaliste indépendant, Romain Molina, spécialisé en foot la raison est claire : « le calendrier des matchs est hallucinant. Le rythme est absolument frénétique et les corps des joueurs ne suivent pas ». À cause des cas de covid-19 dans les effectifs, le nombre de rencontres repoussées a explosé cette année. Cela provoque des embouteillages dans les calendriers, et les corps sont usés. Les clubs ne travaillent plus tactiquement, ils cherchent à récupérer vite, à avoir des joueurs en forme. Pas à 100%, mais seulement en capacité de jouer. Pire encore, les effectifs sont décimés par les blessures et certains joueurs sont les seules options pour l’entraîneur : ils enchaînent tous les matchs, ce qui provoque une usure musculaire. « Aucun corps, si bien entretenu soit-il, n’est en capacité d’engranger autant d’efforts intenses sans récupération » explique Pierre Louis Bossy, kiné du sport. « Après un match, un corps devrait pouvoir se reposer au moins 24h, cette année le rythme imposé n’est pas supportable pour les athlètes. Honnêtement le nombre de blessure ne me surprend pas ». De grands professionnels au physique habituellement irréprochable se retrouvent avec des pépins. « Il y a tout de même un véritable écart entre ceux qui ont une vision d’athlète et ceux qui sont moins professionnels. Avec un rythme normal cela ne se remarque pas tout le temps mais, aujourd’hui, c’est flagrant » dénonce le kiné parisien. 

À qui la faute ? 

Mais qui blâmer ? Les joueurs ne sont que l’instrument du football circus. Les enjeux financiers sont bien trop gros pour annuler des matchs et des compétitions comme nous l’avons vu l’an passé. Un système qui fatigue Romain Molina. « Nous avons laissé le football prendre une trop grande place dans la société et on ne peut plus vivre sans ». Les enjeux financiers deviennent trop gros, et cela pousse les joueurs à bout. Lors du match de ligue des champions entre Liverpool et le Real Madrid, le milieu de terrain Federico Valverde a joué la rencontre en étant blessé. Un autre facteur serait en partie responsable de la fatigue : les voyages « Prenez un joueur sud-américain qui évolue en Europe. En deux semaines il est peut-être allé jouer à Londres, au Chili, en Bulgarie et au Mexique et ça, au final, ça compte. Le problème, c’est le système. On ne s’en rend compte qu’aujourd’hui avec la pandémie, mais cela dure depuis des années ». Cela se traduit également sur le niveau de jeu. Les grandes équipes ne s’imposent pas et presque tous les effectifs sont irréguliers.

Les joueurs semblent exténués alors que nous ne sommes qu’en avril, on peut alors se demander dans quel état seront-ils lors de l’Euro, entre juin et juillet. Cette compétition demande souvent de grands efforts pour des joueurs qui ne sont pas systématiquement issus de grands clubs et n’ont pas une hygiène de vie irréprochable. Il ne serait alors pas étonnant que l’hécatombe se confirme. 

Vincent Pic