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Au tribunal correctionnel d’Aix-en-Provence, deux prévenus comparaissent pour des faits survenus en 2018 au centre pénitentiaire d’Avignon. Ce jour-là, le 21 avril 2018, un détenu a agressé au couteau un prisonnier lors d’une sortie en promenade. Lors de cette altercation, un autre détenu se retrouvait au milieu de la bagarre. Cinq ans plus tard, le tribunal cherche à en savoir plus sur le déroulement de cette agression, en interrogeant les deux prévenus.
« La part de brume m’apparaît mineure dans ce dossier », déclare le président de l’audience du tribunal correctionnel d’Aix-en-Provence en formation collégiale, à la lecture du dossier.
Ce 16 octobre, le juge a face à lui un premier prévenu, S. Z.1, qui avoue fermement sa culpabilité dès ses premières prises de parole. Détenu jusqu’en 2040, il implore par ailleurs de déclarer l’innocence du second prévenu, X. B1, un ex-détenu, libre depuis octobre 2022. Celui-ci s’est interposé pendant l’altercation en détention sachant que l’agresseur possédait un couteau.
Cette bagarre fut immédiatement signalée par le chef de détention. Des images de vidéo-surveillance du centre pénitentiaire et le témoignage d’une surveillante identifient clairement les victimes et les agresseurs. Ces éléments permettent de caractériser l’implication de deux individus : le premier, S. Z., a agressé au couteau un autre détenu, lui causant une plaie ouverte au cou. Le second, X. B. s’est retrouvé au milieu de cette altercation.
Mais le tribunal se pose une question au sujet de l’intervention du second dans la bagarre : acte de bravoure ou implication dans l’agression du détenu ? La surveillante déplore que X. B. fasse partie des agresseurs. Le prévenu désormais libre déclare, quant à lui, devant le tribunal : « Je ne l’ai jamais agressé ».
Entouré de trois policiers, l’homme dans le box affirme : « C’est moi, j’ai fait une connerie, j’assume » et déplore que l’ex-détenu soit entendu pour ses agissements. Sans avocat, l’auteur des faits martèle qu’il l’a fait seul et l’autre « n’a rien à voir ». Il gesticule, s’agace et se permet de hausser le ton face aux juges : « Me coupez pas la parole, c’est ma vie qui est en jeu ». Lorsque le juge souhaite connaître l’identité de la seconde personne agressée et la raison, le détenu rétorque : « C’est entre lui et moi ». Le président met en évidence « la spontanéité avec laquelle il livre l’histoire avec quelques zones d’ombres ».
« C’est un numéro qui relèverait de la farce » commence le procureur de la République lors de ses réquisitions. Il requiert dix ans d’emprisonnement avec un maintien en détention pour le détenu, auteur des faits, et six ans d’emprisonnement pour l’individu qui s’est interposé, qu’il considère donc comme « un fidèle lieutenant qui va l’assister ». Peine répétée plusieurs fois par le ministère public, à la demande de l’avocat de la défense qui finit par faire un signe « six » de la main pour s’assurer de ce qu’il vient d’entendre.
La victime n’est pas présente à l’audience, ce qui est notamment souligné par l’avocat de la défense : « Il faut arrêter de dire qu’une victime qui ne vient pas, c’est qu’elle a peur. Et si elle n’a pas peur ? ». Au cours de sa plaidoirie, il continue en appuyant sur la lenteur de l’instruction. Cinq années durant lesquelles « l’accusation a le devoir de rapporter la preuve. Le ministère public avait la possibilité de demander des suppléments d’information ».
Le prévenu libre conclut : « Depuis une heure, je suis là, j’ai honte. Je suis droit et je veux continuer ma vie, qui est loin de tout ça » et évoque sa nouvelle vie en compagnie de son épouse, présente à l’audience.
Après un délibéré de vingt-cinq minutes, l’individu s’étant interposé est relaxé alors que l’agresseur est déclaré coupable et écope d’une peine d’emprisonnement de huit ans avec un maintien en détention. Content, le détenu qui ne voulait pas « qu’une personne mange à ma place » repart en faisant un cœur avec ses mains à l’égard de l’homme à la barre et tourne les talons le sourire aux lèvres.
1 Le prénom a été modifié