Le candidat de la France insoumise se présente pour la deuxième fois à l’élection présidentielle. Mais avec des intentions de vote qui oscillent entre 10 et 12%, son accès au second tour semble dépendre d’une alliance avec Benoît Hamon. Est-il possible de revivre un nouveau bouleversement dans cette campagne ? Décryptage.
Entre Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon, c’est un peu “je t’aime moi non plus”. Les deux candidats de la gauche n’ont pas réussi à trouver une entente pour les prochaines présidentielles. Pourtant, ils se sont fait des appels du pied pendant des semaines. Jean-Luc Mélenchon a proposé une série de conditions pour un éventuel ralliement au candidat du parti socialiste dans une lettre. Parmi ses requêtes, une demande “de ne pas s’allier à Emmanuel Macron: ni à la présidentielle, ni à la législative”. Mélenchon a également réclamé l’abolition de certaines mesures phares du gouvernement précédent comme la loi El Khomri, le CICE ou encore l’Etat d’urgence. Enfin, il a réclamé “une assemblée constituante dans les trois mois après l’élection”, “l’instauration d’une sécurité sociale”, “la sortie du nucléaire” et “l’arrêt des directives européennes”.
Les revendications de Jean-Luc Mélenchon ont poussé les deux hommes à se rencontrer dans un restaurant. Des exigences sans doute trop importantes pour Benoît Hamon, qui n’a pas souhaité répondre par l’affirmative. Ce rendez-vous manqué a marqué une rupture dans les relations entre les deux hommes. Pourtant les deux candidats sont très proches dans leurs programmes, hormis peut-être sur les questions européennes. Les deux postulants à l’Elysée s’observent, attendant sagement que l’autre fasse le premier pas.
Mais pour le leader de la France insoumise le temps presse, à 40 jours de la présidentielle. Avec 15 points de retard en moyenne sur Emmanuel Macron, qui est deuxième dans les sondages, on n’imagine pas Jean-Luc Mélenchon pouvoir réaliser l’exploit le 23 avril prochain.
Et chez les militants, on en pense quoi ?
Le jeudi 2 mars, des élus et des militants de la gauche plurielle (écologiques, socialistes, communistes) se sont réunis dans un café près de la rotonde à Aix-en- Provence. Le but ? Discuter d’un éventuel ralliement entre Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon. Peu de débat sur le fond, mais surtout sur la faisabilité du projet. Pour Gaëlle Lenfant, membre du PS, “la gauche a une chance de gagner l’élection présidentielle, on a une fenêtre de tir historique en cas d’alliance entre les deux candidats”.
Même son de cloche chez un militant du parti socialiste, qui est favorable à une union.“Je ne comprends pas ce qu’il se passe, Mélenchon comme Hamon sont favorables à une 6e République, quel est le problème ? Pourquoi ne pas se mettre ensemble ? Certes, nous avons des divergences sur quelques points, mais nous sommes une famille de gauche qui souhaitent une rupture !”. Remonté, l’homme d’une quarantaine d’années en rajoute une couche, “On a aujourd’hui un danger réel, l’extrême droite, qui est aux portes du pouvoir. La recomposition doit se faire maintenant !”.
Mais pour un partisan de la France insoumise, une union ne pourra pas résoudre les problèmes fondamentaux. “Il est d’abord nécessaire de régler les divergences sur des points extrêmement importants, comme l’Europe. Sur la 6e République, faut-il faire une constituante ou réunir un groupe de personnes pour soumettre un texte au référendum ? Ce n’est pas en sautant de la chaise et en disant union, union, union que ça va se faire !”
Les avis sur le terrain sont donc discordants, et il semble bien difficile pour les deux gauches de se mettre d’accord avant le 17 mars, date limite du dépôt des candidatures. Si Jean-Luc Mélenchon fait cavalier seul, il aura le mérite d’avoir porté ses idées, mais il sera jugé en partie responsable de la défaite de la gauche à la présidentielle. Tout comme Benoît Hamon.
Jordan Piol-Speranza