Dans la lignée d’un jugement français, la cour suprême britannique a condamné Uber en février, estimant que les chauffeurs devaient être considérés comme des salariés. Ce jugement intervient dans un contexte d’ascension des plateformes de livraison. Un secteur qui profite de la crise.

Uber Eats, l’une des principales plateformes de restauration livrée, enregistre une croissance de 224 % sur le dernier trimestre 2020. Un engouement économique se fait sentir et de nombreuses plateformes font leur apparition : Lyon-Eats, Call Eats Alsace ou encore BeeFast. Une émergence qui s’explique par des raisons logiques. Le couvre-feu, fixé en fin d’après-midi, empêche de commander « à emporter », et force l’utilisation des plateformes de livraison. « Je commandais très peu auparavant, parce qu’en tant que citadine, c’était assez simple d’aller chercher des repas. Mais depuis le premier confinement, lorsque j’ai envie de me faire plaisir sans cuisiner, c’est une vraie solution de facilité », détaille Julie, étudiante. « Après, j’évite d’en faire trop. J’ai tendance à culpabiliser parce qu’écologiquement, c’est discutable, et les conditions de travail sont loin d’être idéales ». Les livreurs, souvent payés à la course, ne profitent en effet pas de la stabilité d’un contrat.

Même son de cloche pour Luc, vivant à Paris : « D’habitude, comme il y a des restaurants tous les 100 mètres, c’est assez simple de manger dehors. J’ai une toute petite cuisine, pas très pratique, et prendre à emporter c’est plus simple ». Mais depuis le COVID, le jeune homme préfère commander, pour des raisons de simplicité. Mais il y a aussi des raisons sanitaires : « J’ai attrapé le COVID, et c’était carrément irresponsable de sortir pendant cette période, du coup commander, c’était idéal, et je ne mettais personne en danger en le faisant », raconte Luc. Dans la capitale, la livraison a pris une nouvelle échelle. Stanislas, ancien livreur d’Uber Eats, retrace l’historique : « Au début, les restaurants avaient déjà un endroit spécifique pour nous, mais au fil des années, ils ont vraiment développé cet espace. Chez McDonalds par exemple : en 2019, il fallait que j’aille au fond du restaurant pour réceptionner les commandes à livrer. Depuis environ un an, le lieu a été réaménagé pour mieux accueillir les livreurs ». Les restaurants s’adaptent à cette offre nouvelle, tout particulièrement avec la crise sanitaire, puisque ce type de commande est devenu majoritaire auprès de la clientèle.

Les applications de livraison ne constituent pas la seule solution, et il arrive que les restaurants engagent des livreurs, comme Ilies : « J’ai bossé de manière ponctuelle pour un « chicken », et ce qui était assez amusant, c’est qu’on s’est constitué une clientèle régulière pendant le confinement. Du coup, on a commencé à connaître un peu les gens, puisqu’ils commandaient souvent chez nous ». La problématique se déplace alors : les conditions de travail dépendent totalement de l’employeur, c’est le cas de la livraison classique. Un peu bouleversé par le COVID : « Il a fallu embaucher, et les patrons ont augmenté l’effectif, puisque la demande explosait », raconte Ilies. Qu’il soit interne ou externe à l’établissement, ce service est donc de plus en plus plébiscité par les consommateurs. Reste à savoir jusqu’à quand.

Simon Ansart-Polychronopoulos