Lundi 22 février midi, le préfet des Alpes-Maritimes a dévoilé le verdict tant attendu. La plus grosse nouvelle est celle d’un confinement des villes du bord de mer pour les deux prochains week-ends. Entre incompréhension et appréhension, la majorité des locaux dénonce des mesures inadaptées. 

Le département le plus touché de France. C’est la triste appellation que revêtent les Alpes-Maritimes depuis ces dernières semaines. Ce dimanche 21 février, les autorités sanitaires enregistraient 994 décès au total depuis le début de l’épidémie dans le secteur. 

Pour contrer ce phénomène, le ministre de la Santé, Olivier Véran, annonçait ce samedi que des décisions strictes seraient prises. C’est maintenant chose faite, depuis le discours de Bernard Gonzalez, le préfet du 06. 

Un confinement partiel, seulement le week-end, représentait un des scénarios les plus probables : c’est bel et bien ce qui attend les habitants dès ce vendredi 18h. L’arrière-pays n’est pas concerné, même si les indications officielles, assez floues, incluent la ville de Grasse. Au total, 90 % de la population est donc touchée. En plus de ce qui peut être perçu comme la sanction d’un relâchement, le bord de mer, de Menton à Théoule-sur-Mer, sera lui aussi fermé. Du côté professionnel, les magasins de plus de 5 000 m2 devront tirer le rideau, et un « médiateur Covid » devra être présent dans les plus petites enseignes. Enfin, le port du masque s’étend désormais à l’ensemble du territoire départemental, et la vente d’alcool sur la voie publique est interdite jusqu’à nouvel ordre. 

Ces décisions apparaissent comme inefficaces aux yeux des habitants, qui ressentent, une nouvelle fois, un sentiment d’impuissance. C’est notamment le cas des professionnels de santé et des commerçants, qui redoutent le retour de problèmes rencontrés lors des deux derniers confinements. 

« Ce confinement crée de la frustration chez les gens » 

« Mettre un confinement le week-end, ça n’a aucun sens », affirme Fanny Germain, étudiante infirmière en dernière année. Pour cette jeune femme, résidant à Nice, la solution parait totalement inadaptée à la situation « les contaminations se font lors des regroupements. Mais je le vois au quotidien au travail, le week-end, les familles profitent autrement, ont plus de temps, et par exemple il y a beaucoup moins de monde dans le centre-ville ou les transports en commun ». L’Azuréenne de 22 ans redoute même l’effet inverse : « ce confinement crée de la frustration chez les gens. Au final, ils respectent moins les gestes barrières et les consignes, et veulent à tout prix se retrouver : ils en ont marre ». D’un point de vue médical, elle aurait même plutôt choisi une option menant à un confinement drastique mais rapide. « Un véritable confinement aurait été beaucoup plus approprié. On aurait ainsi laissé le temps aux soignants de vacciner. Je ne pense pas que le nombre de cas va baisser », ajoute-t-elle avant de repartir en soin chez un patient. 

Même son de cloche du côté des pharmaciens. Carole Legay, préparatrice à Cannes, reconnait que « généralement, tous les professionnels dans le domaine médical trouvent que ce n’est pas assez ferme ». Pour cette quarantenaire, l’État n’aurait pas dû faire de distinction à l’intérieur du département. « Le littoral c’est tout et rien. On aurait dû confiner tout le département. J’habite le village de Mouans-Sartoux, qui n’est pas au bord de mer, et je suis concernée ! Pareil pour Grasse… » déplore-t-elle, soutenue par ses collègues. Sans rejeter la faute sur un bouc-émissaire particulier, elle ajoute avec agacement « l’afflux des vacanciers dans le 06 depuis une semaine rend ce choix inutile. Même si le taux va baisser, c’est insuffisant. Le maire de Nice avait demandé à ce que les locations saisonnières soient interdites, et le Conseil d’État a annulé son arrêté ! C’est honteux, on paye les pots cassés ». 

Du côté des gérants de boutiques indépendantes, les reproches semblent plus virulents. Myriam Bec, gérante de l’enseigne de prêt-à-porter « Beautiful Hair » sature. « En tant que commerçante je ne veux pas de confinement. Il faut que le gouvernement laisse les gens vivre et surtout travailler ! Toutes ces mesures nous dérangent ; personne ne vient dans les commerces, il n’y a plus de clients ! », lance-t-elle en montrant son magasin, totalement vide. Pour cette mère de famille de 50 ans, l’ensemble des Français s’est habitué à la Covid-19 « tout le monde est responsable et conscient. La population se protège déjà au quotidien. On doit nous laisser travailler et nous faire confiance pour faire face au danger ». Outre les risques sanitaires, la femme d’affaires a peur quand elle évoque, difficilement, le futur de son entreprise « Cette décision de confinement local va faire empirer la situation économique, c’est pas du tout la meilleure solution. Au final on se retrouve avec des villes mortes ». Reste à savoir si d’autres villes, ailleurs en France, seront concernées d’ici la fin de la semaine. 

Hugo Messina