Il est presque huit heures, nous sommes le dimanche 3 mars 2019. Mélina Pourcil se détache quelques instants du stand de paniers en osier de ses parents. Vêtue d’un tablier vert, la jeune femme apparaît comme une véritable professionnelle. Ses cheveux noirs tressés retombent sur ses épaules. Nous nous asseyons sur deux tabourets en bois près du stand. Mélina, 19 ans, a parcouru les marchés avec ses parents dès son plus jeune âge. Depuis des générations, sa famille incarne la vannerie. Artisans, ils se déplacent dans toute la région Occitanie afin de vendre leurs produits. Mélina a arrêté l’école à 16 ans. Brevet en poche, elle a décidé de poursuivre la tradition familiale. «C’était une évidence, les cours n’étaient pas faits pour moi.»
Elle confie à demi-mot, qu’elle pratiquait l’école buissonnière. Plutôt que d’assister aux cours Mélina préférait «travailler». Cette confidence semble lui rappeler de bons souvenirs. Une légère étincelle fait briller ses grands yeux noirs. « Un jour, mes parents partaient pour un village dans les Cévennes. Je voulais absolument y aller avec eux. Ils ne voulaient pas que je rate des cours. Du coup, je me suis cachée à l’arrière de la camionnette. J’ai passé tout le trajet entre les paniers à imaginer la réaction de mes parents.» Ils ont tout simplement ri. Ses paternels lui ont ensuite expliqué l’importance d’avoir le diplôme minimal. Même si sur le moment Mélina n’en a pas compris l’intérêt, elle est désormais contente d’avoir cette sécurité. La jeune fille hésite, elle n’est pas sûre d’exercer cette activité toute sa vie. Elle aimerait prendre son indépendance vis-à-vis de ses parents et quitter le nid familial. Pendant sa scolarité, elle s’est installée avec sa famille dans un appartement à Palavas-Les-Flots. Ils souhaitaient qu’elle évolue dans l’environnement le plus stable possible. Ensuite, ils ont investi dans un camping-car. Cela facilitait leurs déplacements et leur permettait d’aller de plus en plus loin.
Brusquement, Marcel Pourcil l’appelle au loin, les bras chargés de paniers. Elle bondit et court aider son père. Le marché se remplit, elle doit serpenter entre les passants. Ses bras robustes se saisissent des marchandises et les disposent sur la table de fortune. Pour la première fois depuis des semaines, elle s’est octroyée une pause. Debout derrière son étal, Mélina paraît assurée, et un large sourire déforme sa bouche. Entre deux clients, les confidences se poursuivent. Son grand rêve serait d’ouvrir une boutique de bijoux fantaisies au bord de la mer. Quand on l’interroge sur ce qu’en pense ses parents, son visage se ferme.
Il est presque 09h30, le marché déborde de monde.
Anna Blay