Histoire rocambolesque au tribunal correctionnel d’Aix-en-Provence hier après-midi. Un prévenu de 22 ans alcoolisé a été jugé pour violences verbales et physiques sur des membres dépositaires de l’autorité publique. Il les avait lui-même contacté par téléphone sans aucune raison valable.
L’alcool donne parfois lieu à des comportements étranges, et ce n’est pas la procureure Sophie Bot qui dira le contraire. « Prendre son téléphone, appeler des policiers, les traiter de tous les noms une fois qu’ils sont sur place, puis se jeter sur l’un d’entre eux, tout ça pour une consommation d’alcool. Monsieur, quelles leçons vous donnez à vos enfants ? » déclare-t-elle en préambule de son intervention, hier au tribunal de grande instance.
Le 1er septembre 2018, trois policiers frappent à la porte de l’appartement du jeune homme. À l’intérieur, des cris et un vacarme incessant. Le prévenu alcoolisé sort torse nu sur le palier. Sa petite fille de cinq ans s’approche de son père mais elle est repoussée violemment. Il prend ensuite pour cible un des trois policiers en lui proférant des menaces de mort. Tout en titubant et en s’accrochant aux murs du couloir, il se jette sur l’un des agents. Il sera finalement maîtrisé par les policiers puis incarcéré au commissariat le plus proche.
Un problème d’addiction à l’alcool
Devant le juge, le prévenu déclare que l’alcool a pris le dessus ce soir-là, mais que cette addiction est un problème permanent chez lui. Lorsque le juge lui demande combien de verres il avait consommé, l’homme aux cheveux bruns reste évasif, « il me semble avoir bu quelques bières assez fortes » résume- t-il sommairement. Sa femme, présente au procès et assise au premier rang, a déjà porté plainte pour violence dans le passé. Dans son box, l’individu qui fait beaucoup plus vieux que son âge est dans une situation familiale complexe. Il vient tout juste de quitter la Nièvre, département dans lequel il habitait auparavant avec ses quatre frères, et qui avaient semble-t-il, un goût prononcé pour la boisson. La plaidoirie de l’avocate du prévenu, Me Lucie Braca, repose essentiellement sur cet argumentaire. Elle invoque une vie de famille compliquée et le passé douloureux du jeune homme. Celui-ci n’a aucun modèle parental, il a vécu dans plusieurs foyers d’accueil de 8 à 15 ans. Pour éviter la mauvaise influence de ses frères, le prévenu décide donc de tout plaquer et de venir s’installer dans les Bouches-du-Rhône avec deux enfants sous le bras, dont un petit garçon de deux ans.
Mais cette histoire n’a pas semblé influencer la procureure qui a rappelé à ce père qu’il avait déjà été condamné le 10 mars 2017 pour violence. Elle demande 18 mois d’emprisonnement dont 6 avec sursis, une indemnisation des victimes et un maintien en détention. À son annonce, le jeune homme fond en larmes dans le box.
Quelques minutes plus tard, les juges rendent leurs décisions et se montrent plus conciliants. Le prévenu écope d’un an et demi d’emprisonnement, mais de 12 mois avec sursis. Il n’est pas maintenu en détention et doit se présenter devant un juge d’application des peines pour les 6 derniers mois qu’il effectuera sans doute à l’extérieur des barreaux.
Jordan Piol-Speranza