Clinique Axium © Magistère DJC
En 2022, plus d’un milliard de personnes, soit environ 15% de la population, présentent une forme de handicap selon l’Organisation Mondiale de la Santé. Qu’il soit physique ou mental, visible ou invisible, congénital ou accidentel, le handicap peut être source de discrimination. Alors que la société se veut de plus en plus inclusive, s’est-elle réellement adaptée en pratique aux situations de handicap ? Retour sur le parcours de quatre personnes concernées, de près ou de loin.
« J’ai essayé de me dépasser en essayant d’avoir une vie la plus proche possible de ce qu’elle était avant », déclare André Aubépart, paraplégique depuis l’âge de 23 ans à la suite d’un accident de moto. Son accident ne lui a pas fait renoncer à sa passion, la chasse, se déplaçant désormais en quad. Actuellement Président de l’association de chasse de Montmorin, il déplore un manque d’accessibilité dans les lieux publics : « les adaptations pour les personnes en situation de handicap sont réfléchies par des gens qui ne sont pas touchés dans leur propre chair. On arrive à des choses qui ne sont pas adaptées ou qui servent pratiquement à rien ». Et si la parole était donnée aux personnes concernées ?
« Il y a des aménagements qui sont faits mais c’est loin d’être parfait, que ce soit dans ce qu’on met en place ou dans la sensibilisation des gens » déclare Hugo Lequin, étudiant en troisième année à la Faculté de Droit et de Science Politique d’Aix-en-Provence. Atteint d’aniridie congénitale, un handicap visuel, pour lui les déplacements sont de vrais parcours du combattant. « Même si je connais le chemin, c’est pas facile ! ».
Aujourd’hui, ce sont les personnes en situation de handicap qui doivent s’adapter à la société. Alors que cela devrait être le contraire.
Inclusion scolaire et professionnelle
L’école joue un rôle déterminant pour la construction d’un enfant. Or, pour les enfants atteints d’un handicap quel qu’il soit, il est nécessaire que cette institution mette en place des dispositifs d’aménagement pour les accompagner. Selon l’Education nationale, 430 000 élèves en situation de handicap ont été accueillis dans les écoles ordinaires à la rentrée 2022. Pour assurer le bon déroulement de leur scolarité, les accompagnants jouent un rôle de premier plan dans l’éducation inclusive. Hugo était suivi par une Auxiliaire de Vie Scolaire (AVS) du collège au lycée, « elle était très importante car elle me soulageait dans la prise de notes ».
Colas Mesnil est éducateur dans un SESSAD d’autisme (Service d’Éducation Spéciale et de Soins à Domicile). Son rôle est d’accompagner l’enfant pour qu’il ait « la vie la plus ordinaire possible dans le milieu ordinaire ». Pour ce faire, il accompagne de jeunes autistes sur leurs lieux de vie (école, domicile, loisirs…). « Nous ne changeons pas la vie des gens mais on leur apprend à changer leur vie eux-mêmes. On développe la praxie des personnes » précise-t-il. L’accompagnement éducatif consiste à leur permettre de prendre en main leur vie pour devenir le plus autonome possible.
Toutefois, trouver la bonne distance entre l’exercice de leur métier et l’attachement qu’ils éprouvent pour les bénéficiaires peut être difficile. « Le pire serait de ne pas s’attacher aux personnes avec qui on travaille, de rester totalement indifférent et d’agir comme une machine » confie l’éducateur.
Après son accident, André n’a pas eu du mal à se réinsérer professionnellement « j’ai eu un patron formidable ». Anciennement ouvrier en plomberie, il déclare avoir repris « un an et demi après l’accident dans la même entreprise, au bureau, au lieu d’aller sur les chantiers ».
Faire de son handicap un moyen d’aider les autres
Faire du kayak au pied d’un glacier ou gravir le Kilimandjaro, le plus haut sommet d’Afrique, en étant paraplégique, c’est possible. Pierre Cabon, créateur de contenus pour le média Wheeled World, montre aux abonnés qui le suivent une image positive du handicap. Blessé lors de l’attentat du Bataclan du 13 novembre 2015, il devient paraplégique mais n’abandonne pas ses rêves pour autant. Avec sa compagne, ils partagent une passion commune, le voyage. C’est alors qu’ils lancent en 2018 Wheeled World : un média visant à mettre en lumière les aventures en fauteuil du couple, « pour retracer nos voyages et transmettre des informations d’accessibilité pour que d’autres puissent eux aussi partir en voyages ».
Ils communiquent sur ce tourisme de niche. « Les personnes en situation de handicap ne savent pas forcément ce qu’elles peuvent faire en voyage ». Ainsi, ils travaillent avec des offices de tourisme ou des destinations touristiques afin de mettre en avant toutes les initiatives inclusives qui existent chez eux.
Le couple aide des personnes en situation de handicap à se projeter. Sur leurs réseaux, ils expliquent comment changer une main courante ou comment prendre le train en fauteuil. « Quand on est en situation de handicap, c’est une réouverture de pouvoir se dire que “moi aussi je peux me déplacer, découvrir le monde ou mon propre pays en ayant la bonne information et le bon équipement“. »
Source d’espoir et modèle de résilience, André, Hugo et Pierre, sans oublier Colas, prouvent que malgré une société plus ou moins inclusive, ils ont su, par eux même, s’adapter.