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Clémence est Franco-russe ; elle est étudiante en Sciences Physiques à Moscou en ce moment même. Mona est Française ; elle est étudiante en Droit à Aix-en-Provence. Les deux jeunes filles ont 21 ans et affichent un regard diamétralement opposé sur le conflit russo-ukrainien. Des réponses très tranchées, parfois choquantes, qui en disent long sur les différences culturelles et sociétales: propagande et désinformation à la clé…

Quel regard portez-vous sur le traitement médiatique du conflit ?

Clémence (à Moscou): « Selon moi, les journalistes (européens) ne montrent pas l’envers du décor, comme les accords de Minsk piétinés depuis plusieurs années. Lorsque le peuple russophone vivait sous les bombardements de l’armée ukrainienne pendant 8 ans, personne n’en parlait, puisque ces morts ne sont pas intéressants pour eux. Poutine était le seul à demander l’arrêt des bombardements. En terme de guerre médiatique, l’Europe l’emporte largement sur la Russie. On y retrouve l’influence psychologique avec l’utilisation de termes se basant sur le bon sens humain, suscitant ainsi la pitié comme « morts de civils, d’enfants, de personnes âgées », la « population souffre ». Des photos de gros plans avec des personnes (en général des femmes ou personnes âgées) en pleurs ».

Mona (à Aix-en-Provence) : « Je trouve que les médias français et européens restent très factuels, même si je remarque tout de même une tendance pro-ukrainienne. Les actes de la Russie sont dénoncés. Selon moi, il n’y a pas lieu de parler de propagande européenne : cela n’existe qu’en dictature. Et en Europe, il n’y en a pas. C’est donc simplement de la diffusion d’informations ». 

Quelle est votre opinion personnelle sur la situation actuelle ?

Clémence : « Personne n’aime avoir des tanks dans ses villes ! L’armée russe tente au maximum de ne pas tuer les civils, ce n’est pas dans leur but! Mais c’est malheureusement l’autre côté qui tire sur eux … Même si le côté européen dira sans doute que c’est de la « propagande poutinienne ». Le fait que l’armée ukrainienne a tué des civils, comme récemment des jeunes femmes profs, personne n’en parle. Comme quoi, on a l’impression que certains morts ont plus d’importance que d’autres. Pourtant, les militaires ukrainiens qui se rendent sont traités avec respect ».

Mona : « Je trouve la situation très triste et regrettable. La Russie se lance à nouveau dans une guerre, c’est ridicule : tout cela me semble motivé par des questions d’égo. J’ai le sentiment de vivre un épisode de la guerre froide. Nous sommes en train de reculer. Je soutiens vivement les manifestations pacifistes qui se multiplient en Europe ». 

Que pensez-vous de la réaction européenne ?

Clémence : « L’Europe est dans son hystérie la plus totale ! C’est même drôle à observer ! Ils n’ont rien d’autre à faire que d’avoir les yeux rivés sur la Russie en scrutant ses moindres gestes, ou en mettant des sanctions pour le moindre déplacement d’un millimètre ».

Mona : « L’Europe ne se mouille pas complètement car elle refuse d’envoyer des forces armées en Ukraine. Mais ça n’est pas plus mal, car ce dont l’Ukraine à le plus besoin selon moi, c’est d’un soutien politique. Il faut faire pression sur la Russie, ensemble, à l’échelle européenne. Infliger des sanctions économiques me semble donc très efficace et pertinent »

Avez-vous peur ?

Clémence : « Non, je n’ai pas peur. Sauf peut-être de l’impact que cela peut avoir sur mon avenir, puisque je suis en mobilité depuis la France. Certaines facs françaises demandent aux Français de rentrer, allant jusqu’à harceler les parents. Pour ma part, on m’a juste demandé si tout allait bien. Je ne connais aucun jeune qui est allé manifester, puisque les étudiants risquent d’être renvoyés de leurs universités si cela se sait ».

Mona : « Au tout début, comme tous les Français, je n’avais pas réalisé l’ampleur de la situation. Mais un climat de peur s’est installé progressivement et aujourd’hui, je suis de très près les informations. Tout cela est assez anxiogène et la situation n’est pas à prendre à la légère, même si c’est encore loin et presque irréel ». 

 

Jeanne Dumas