Le bénévolat, une solution pour agir en temps de crise ?
21 juin 2021
De plus en plus de Français font le choix de s’investir dans diverses associations. Une idée vertueuse pour aider son prochain, mais aussi pour occuper utilement son temps libre. En pleine épidémie, cette initiative prend encore plus de sens. Les besoins de première nécessité sont en hausse, et sans l’effort de ces personnes dévouées, la situation serait bien pire. Le bénévolat, un moyen également intéressant pour combattre l’ennui, ennemi numéro un pendant les confinements. Quatre individus d’horizons différents exposent leurs motivations et la manière dont ils gèrent leurs actions en ce moment.   

Nice

Slim Ben Youssef, responsable d’une épicerie solidaire pour étudiants : « Répondre au mieux aux besoins des étudiants »

Slim Ben Youssef, responsable de l’AGORAé

Selon un sondage mené par France Bleu et Franceinfo, 80 % des 15-30 ans reconnaissent avoir subi des préjudices importants du fait de la pandémie. Face à cette précarité alarmante, l’association FACE06 intervient depuis près de 15 ans au sein de la vie étudiante niçoise. Avec son épicerie solidaire AGORAé, le soutien à la communauté estudiantine s’affiche comme but principal.

Les grands oubliés de la crise

Slim Ben Youssef, élève de M1 en Entrepreneuriat à la faculté d’économie, est responsable de l’épicerie AGORAé. Fêtant ses 9 ans d’existence, elle propose aux plus précaires de la nourriture. Selon Slim, « l’objectif est de pouvoir répondre au mieux aux besoins alimentaires des étudiants ! ».

Mais le gaillard de 1m95 insiste sur l’urgence que la Covid-19 a instauré « il était évident de maintenir et renforcer les actions de l’AGORAé ».

Tout en rangeant des caisses dans le magasin, le jeune homme de 22 ans a du mal à admettre la catastrophe « la barre des 200 bénéficiaires a été passée… ». Pour lui, les étudiants figurent parmi les grands oubliés de la crise. D’après le Niçois « c’est un impératif de laisser la structure ouverte ».

Un nouveau schéma pour agir

Malgré les contraintes, Slim a régulé l’activité « nous ouvrons du lundi au vendredi. Cette cadence permet aux bénéficiaires de venir à tout moment ».

De plus, avec le soutien majeur de la Ville de Nice, l’AGORAé a pu développer différents ateliers. « Nous couvrons diverses thématiques par le biais de webinaires afin de réduire lisolement », avance-t-il avec sourire.

Des obstacles se dressent encore : « le couvre-feu est un vrai casse-tête pour l’organisation. Nous avons été dans lobligation dajuster nos horaires ».

Un bel exemple du soutien soudé des jeunes entre eux.

 

Cannes

Christine Jomat, responsable des bénévoles du Secours Catholique : « Guider les personnes plutôt que les changer »  

Christine Jomat, responsable au Secours Catholique

Entraînant une hausse de la précarité, la crise sanitaire a été désastreuse. Des associations comme le Secours Catholique proposent une prompte intervention sociale.

La conviction d’accompagner l’humain

Occupant à ce jour le poste de responsable de l’antenne cannoise du Secours Catholique, Christine Jomat s’engage depuis presque 15 ans. Pour cette ancienne infirmière, c’était naturel d’opter pour le bénévolat « C’est une conviction profonde. Jai toujours baigné dans ce milieu, avec un père responsable associatif ».

Le choix de cette association était évident « je suis catholique. Jai atterri ici car jy retrouve des valeurs chères à mon cœur, comme l’altruisme ». La volonté de ré-humaniser des populations prédomine, « On cherche à soutenir l’individu dans ses choix ». La mission de ces anges gardiens est claire « notre rôle est de guider les personnes plutôt que de les changer ».

Réagir dans l’urgence face à la crise

Une adaptation s’est imposée aux bénévoles. « Nous avons stoppé nos ateliers dalphabétisation et laccueil des femmes de la rue a été mis entre parenthèses ». Christine poursuit « nous nous axons sur laccueil social », expliquant que depuis mars, les bénévoles ne peuvent être qu’une petite douzaine à la fois à contribuer.

La responsable explique avec dépit « face à nous se dresse une pauvreté inenvisagée ». À cet afflux se greffent les gens en situation de solitude extrême, face à laquelle il faut recréer du lien social.

L’association a été soutenue par des donateurs, très impliqués depuis le premier confinement, « nous avons récolté pas moins de 5 millions deuros ! ».

Avant de retourner avec ses protégés, Christine Jomat prévient tout de même : « il faut être conscient du monde particulier qui nous fait face. Mais c’est une aventure merveilleuse ».

 

Paris 

Franck Bénéï, responsable à la Fédération Nationale des CIDFF : « C’était inenvisageable de ne pas apporter de réponse pendant la crise »

Franck Bénéï, responsable à la FNCIDFF

Les confinements ont vu bondir en France le nombre de violences conjugales. Depuis bientôt 50 ans, la Fédération Nationale des CIDFF (Centre d’Informations sur le Droit des Femmes et des Familles) est un acteur majeur dans cette lutte. La pandémie n’est pas prête de ralentir l’implication.

Un bénévolat clairement féministe et apolitique

Franck Bénéï, responsable au sein de la FNCIDFF, précise le rôle décisif de la structure : « lassociation œuvre pour promouvoir la parité sur tous les points ». La FNCIDFF poursuit un but précis « lautonomie personnelle, professionnelle et sociale des femmes ». Selon l’homme de 54 ans, près d’un million de demandes par an afflue de toute la France. La crise Covid risque de gonfler ce chiffre pour 2021.

Assurer un service normal

Au bout du fil, il l’assure « en appliquant les protocoles sanitaires, lactivité a pu reprendre assez vite. C’était une nécessité absolue ».

D’ordinaire, l’association privilégie la rencontre physique « on va faire des conférences dans les lycées et collèges pour sensibiliser les plus jeunes ». Mais la pandémie a complètement changé le paradigme.

Pourtant, une aide persiste encore pendant la crise « Il y a un suivi avec des numéros dappel spécifiques ou des aides par chat ». En comptant sur ses 3 000 bénévoles, l’association parvient à garder la tête hors de l’eau.

Pour 2021, Franck Bénéï souligne qu’une campagne en ligne est déjà en place « #EtEnPratique vise l’objectif de rendre effective la loi dans la lutte contre les violences ». Le combat persistera encore pour longtemps.

 

Marseille

Antoine Minet, président de l’association EMASSI : « Maintenir la motivation tout au long de l’année »

Antoine Minet, président de l’EMASSI

Beaucoup d’organismes ont pour objectif d’impliquer les jeunes dans la société. L’association EMASSI (Étudiants Marseillais Actifs dans la Société et la Solidarité Internationale) leur propose de s’investir dans des projets locaux ou internationaux. Le président du groupe, Antoine Minet, explique l’impact de la crise sur les actions bénévoles. 

Une envie inébranlable malgré le ralentissement des projets

Pour cette association prônant partage et entraide, la période complexifie nombre d’initiatives. Le jeune homme de 22 ans déplore un coup d’arrêt sur les activités « nous avons dû annuler nos projets externes pour 2020 et lincertitude plane pour ceux de l’été 2021 ».

Mais la pandémie ne doit pas casser le moral « mon rôle est de maintenir la motivation des membres du bureau ! », répète Antoine. D’après lui, l’aide à autrui semble renforcée, « nos maraudes ont été nécessaires pour tous les bénéficiaires et pour nos étudiants ».

Se réinventer pour répondre aux besoins

Le jeune garçon a réussi à perpétuer les actions de l’EMASSI au niveau local. « Nous avons continué de proposer des missions de solidarité, notamment avec une course pour le handicap » explique l’étudiant provençal.

Le responsable remarque aussi que le nombre de bénévoles a drastiquement augmenté « la crise a fait naitre des vocations, avec 150 néo-adhérents ».

L’association a aussi trouvé des réponses via les réseaux sociaux, avec des appels au volontariat « on a développé ces nouveaux moyens de communiquer, sur Instagram par exemple ».

Avant de se quitter, Antoine confie quelques inquiétudes pour 2021. « C’est urgent que tout redevienne normal » dit-il en espérant que la vie reprenne rapidement.

 

Hugo Messina