Le président français Emmanuel Macron annonçait la semaine dernière un plan de déconfinement progressif. Parmi les étapes prévues, la très attendue réouverture des commerces. Ils comptaient en effet beaucoup sur la période de Noël pour compenser les pertes dues aux confinements.
Les petites rues montpelliéraines étaient étonnement vides, le weekend dernier. Elles étaient autrefois, avant cette pandémie, toujours joyeusement animées. L’annonce de la réouverture des commerces ne semble pas avoir suffi à leur redonner vie. Mélanie, à la tête d’un petit commerce de prêt-à-porter, qualifie cette réouverture de « décevante ». « J’étais très excitée à l’idée de reprendre dans des conditions plus normales. Mais il n’y avait pas un chat ! ». Les conditions n’étaient pas idéales pour une réouverture, il est vrai. La météo avait de quoi dissuader même les plus téméraires d’entre nous. Les rares à braver la pluie le faisaient pour manifester contre l’article 24 : inutile de préciser que rendre visite aux petits commerces n’était pas dans leurs projets. Pour autant, Mélanie est certaine que cette reprise décourageante n’est pas due à une mauvaise conjoncture. Selon elle, « nous nous sommes tous habitués à un nouveau mode de vie. Nos habitudes de consommations ont, elles aussi, dû s’adapter. C’est pour ça que je me suis beaucoup plus impliquée sur les réseaux sociaux cette fois, avec un système de click and collect, notamment. » Instagram est pour beaucoup devenu une nouvelle plateforme de vente. Mélanie estime avoir la chance de vivre en centre-ville : « puisque j’habite près de ma boutique, je faisais des allers-retours à la demande. Dès que mes clientes le voulaient, elles pouvaient récupérer ce qu’elles avaient réservé sur les réseaux sociaux ». Grâce à cet avantage, ce dernier confinement ne lui a pas semblé trop rude. Mais beaucoup n’ont pas eu cette chance.
Les consommateurs se sont habitués à ne plus faire leurs courses dans les boutiques. Pas d’effervescence dans les commerces, donc. D’autant plus qu’il est encore tôt pour paniquer et faire ses achats de Noël au dernier moment. « J’ai prévu, comme la plupart des petits indépendants, de rester ouvert tous les jours. Je compte énormément sur cette période de l’année. J’ai perdu beaucoup d’argent cette année… » En effet tout restera ouvert jusqu’au 24, y compris tous les dimanches. Pour les consommateurs, il n’y a pas d’urgence. Il n’est pas rare que les traditionnelles courses de Noël se fassent au dernier moment. Pour ce qui est des commerçants et de leur moral, c’est une toute autre histoire. Le regard de la jeune femme est fatigué. Elle court partout dans la boutique. Elle ajuste les foulards dans un coin, replie un pull à l’opposé, réajuste un sac accroché au mur. Le tout, dans une boutique désespérément vide. Ce spectacle me désole. La musique d’ambiance résonne étrangement, sans le chahut des clients.
Quelques rues plus loin, les centres commerciaux sont pris d’assaut. Anna, vendeuse chez Kookaï, tient un tout autre discours. « Depuis vendredi, on ne s’arrête pas ! La boutique est bondée, d’autant que c’est les soldes. On fait tout pour aider nos clients et les satisfaire au mieux. On imagine que ça leur fait du bien de changer d’air. » Tout au long de cette pandémie, l’accent a été mis sur les dures conditions des petits commerçants. Et pourtant il semblerait que non, nos habitudes de consommation n’ont pas été modifiées par ces confinements successifs.
Lucie Hugonenc