Marianne et Patrice sont les gérants de l’épicerie bio « Le panier vrac » à Cannes. Ils affichent un objectif simple : promouvoir une façon de consommer durable. 

Dans le quartier populaire de la République à Cannes, une devanture retient l’attention des passants. Entre Lidl et Picard, la petite boutique du couple se fait remarquer. Peu d’habitants aux alentours étaient habitués à ce genre d’enseignes. Pourtant, en établissant ce projet en 2018, Marianne et Patrice désirent transformer les modes de consommation des habitants du quartier.  

L’idée provient d’abord d’une conviction naturelle dans les valeurs écologistes et décroissantes : « Nous avons toujours consommé bio, responsable. J’ai même vécu 15 ans à l’étranger et je n’ai jamais consommé d’une autre façon » avance Marianne, derrière sa caisse. Leurs anciens emplois respectifs ne les épanouissaient plus. C’est à partir de ce constat que nait « Le panier vrac ». De rencontres en rencontres, ces entrepreneurs prennent de nombreux conseils, notamment auprès d’autres professionnels, pour réussir à monter un projet novateur. Marianne se souvient qu’« une amie avait ouvert une épicerie sur ce concept en Haute-Savoie, et m’a montré comment elle l’organisait. De là, je me suis dit ok, c’est ça que je veux faire. ». La consommation en vrac se dresse alors comme pilier de leur commerce. Le principe, simple, est de pouvoir se servir librement, en quantité souhaitée, pour différents produits. Des aliments de base comme des pâtes ou du riz, des fruits et légumes, des œufs, aux différentes farines, ou autres condiments jusqu’aux savons, huiles, et dentifrices solides qui sont à la vente dans cette véritable caverne d’Ali Baba !

Nouveauté dans le paysage cannois, les débuts de la boutique représentent un challenge. La gérante rappelle d’ailleurs que « c’est un mode de vie qui reste marginal. Dans notre région, la première intention des gens était de venir parce qu’on faisait figure d’épicerie de quartier. ». Mais rapidement, le système de vrac séduit. De plus en plus de prospects deviennent des clients réguliers, voire des « ultra-vraqueurs » comme ils s’amusent à dire. La patronne le reconnaît « c’est souvent l’opportunité qui déclenche la démarche des consommateurs ». S’il demeure difficile de trouver des personnes tournées vers une consommation locale et raisonnée, Marianne l’affirme fermement, « la motivation de changer de vie se fait plus pressante ». 

Cette quarantenaire dresse ensuite un bilan. « Les résultats sont encourageants, les gens font des efforts naturels et surtout ça leur plaît ! », argue-t-elle. Un reflet positif, compte tenu du désir du couple de faire évoluer les mentalités. 

Consommer mieux, utile à tous ?  

Acheter localement, faire travailler les petits producteurs de la région, et arrêter les excès : il s’agit là des principes de ce mode de vie. Sur ce point, l’épicière aux yeux pétillants insiste sur la nécessité de travailler à petite échelle, « on cherche tout le temps et activement des maraîchers bio, ou même de la permaculture, établis localement. Ce sont des petits artisans, et il faut absolument faire travailler les gens qui vivent près de nous. ». Néanmoins, cette amoureuse de la nature  admet les difficultés à trouver des collaborateurs pour la totalité des produits. « On ne peut pas tout acheter localement. On ne trouve pas forcément tout proche de nous, dans ce que nous voulons vendre », constate-t-elle en prenant l’exemple de certains produits cosmétiques écologiques. 

L’épicière azuréenne explique d’ailleurs que le changement de vie passe aussi nécessairement par la cosmétique solide et le zéro déchet pour les produits de beauté. Une démarche qui a pour intérêt majeur de combattre petit à petit la surabondance actuelle. Pour Marianne, « c’est surtout une question d’habitude de consommation, car on aime bien pouvoir tout acheter, tout de suite. Autant mettre son argent ailleurs, et en profiter différemment que d’acheter en grande surface ». De surcroit, elle revient sur les ravages que causent les produits de « grande consommation », sur le plan environnemental et économique, autant que sur la santé des individus. En effet, on constate souvent que la plupart de ces biens utilisent des emballages inutiles et polluants, et usent de formules chimiques néfastes pour le corps à long terme. 

Comme un bon nombre de confrères possédant un commerce de proximité, Marianne soulève l’importance que joue la situation sanitaire actuelle sur ce point. « S’il fallait retenir quelque chose de la pandémie : arrêtons de consommer n’importe quoi, n’importe quand ! La consommation de proximité a été privilégiée. Il y a eu un regain d’intérêt sur ce qu’on mange, d’où ça vient… ». 

En repartant du magasin « Le panier vrac », les sacs remplis de bocaux d’amandes et de noix, de fruits et légumes frais, et d’un nouveau dentifrice solide, les propriétaires laissent un dernier conseil aux plus sceptiques « l’argument économique est déjà primordial : consommer vrac, c’est se débarrasser du coût superficiel des emballages inutiles et polluants. Il y a en moyenne 30 % d’économie sur vos courses. ». Moins onéreux, meilleur pour planète et pour la santé, avec la fierté de faire fonctionner les acteurs près de chez soi, pourquoi attendre pour essayer de consommer différemment ? 

Hugo Messina