« Je n’ai pas une goutte de sang français, mais la France coule dans mes veines »
14 mai 2021
La rédaction est allée à la rencontre de Ghali Bouabid.
Étudiant étranger arrivé de Rabat en 2017, il est en 3ème année à la Faculté de Droit d’Aix-en-Provence. Ghali se définit comme musulman non-pratiquant, et la teneur des récentes polémiques médiatiques l’a profondément attristé.

 

Qu’est-ce que la France représente pour vous ?

 

Elle représente pour moi une culture dont je suis imprégné et dont je maîtrise les codes. Pour preuve, nous parlons français en famille au quotidien J’aime la France, son histoire intellectuelle, et lui suis reconnaissant de m’accueillir pour mes études. Sans pour autant en être citoyen, les crises sociales et les faits de société qui touchent l’hexagone, me touchent.

 

Qu’est-ce que l’expression « islamo-gauchisme » vous évoque ?

 

Il y a un manque de pertinence flagrant dans cette expression. C’est un raccourci gênant. On associe des pratiques individuelles à des idées politiques, ça n’a pas de sens. Il n’existe pas de réalité scientifique du terme islamo-gauchisme, pourtant certains semblent vouloir l’utiliser.

 

Qu’avez-vous pensé des récentes déclarations de Frédérique Vidal sur l’islamo-gauchisme à l’université ?

 

Le plus choquant dans cette histoire, c’est que cela concerne des recherches sur des plans d’urbanisme et de redistribution des zones habitables. Donc très loin du débat actuel.
Ce raccourci est très gênant pour moi. On peut déceler dans ces études une volonté de réhabilitation sociale, de discrimination positive envers les communautés étrangères et notamment d’origines africaines. Mais cela ressort d’un plan d’urbanisme, plan, sur lequel ces derniers sont marginalisés et ce depuis les années 60.
Comment un plan visant à un processus d’assimilation a-t-il pu donner naissance à un débat sur l’Islam ? Et ce sont les mêmes qui parlent de problèmes d’assimilation de ces communautés.

 

Qu’avez-vous ressenti après les récentes déclarations de Gwendoline Lardeux sur l’islam, qu’elle définit comme « RST : Religion Sexuellement Transmissible »?

 

J’admets parfaitement que des communautés étrangères d’origine musulmanes, mettant en pratique de manière exacerbée des traditions parfois aux antipodes de ce que l’on appelle la « culture française », puissent poser problème. Cependant ces propos me choquent profondément. Dans le choix des mots, l’emploi du terme maladie me semble sidérant. Il découle de ce mot une incapacité à masquer sa haine vis-à-vis de cette communauté. Je pense que l’assimilation est un travail qui va dans les deux sens, une œuvre collective. Mis à part une provocation, je n’y vois rien qui encouragerait le processus d’intégration. Le fait que cette professeure associe l’appartenance religieuse à une maladie est une invective vis-à-vis des individus qui portent cet héritage culturel comme une richesse.

 

Nicolas Himene