©Colombe Laferté

Alors que le projet de loi sur la fin de vie promis par Emmanuel Macron devait être présenté à la fin de l’été, il ne sera finalement débattu qu’en 2024 au Parlement.

L’échéance fixée par le chef de l’Etat début avril n’aura finalement pas été respectée. La question de  « l’aide active à mourir », dossier clé du deuxième quinquennat Macron, n’est pas près de s’élucider. Lundi 25 septembre, le ministre des relations avec le Parlement, Franck Riester, précisait les prochaines échéances du projet de loi sur la fin de vie : « Je pense que ça sera en Conseil des ministres avant la fin de l’année, et ensuite au Parlement en 2024 ». Députés et sénateurs devront attendre encore quelques mois avant de débattre sur un sujet attendu depuis de nombreuses années.

Entre décembre 2022 et mars 2023, la convention citoyenne sur la fin de vie avait réuni 184 Français tirés au sort. Son bilan était sans appel : 76% des participants estimaient que le cadre juridique français n’était plus adapté. En effet, le texte de droit applicable est la loi Claeys – Leonetti, adoptée en 2016, après une première version en 2005, qui encadre la fin de vie des malades incurables. Elle permet une « sédation profonde et continue jusqu’au décès » sans toutefois tomber dans une « obstination déraisonnable ». Le législateur interdit ainsi les pratiques de l’euthanasie (le médecin administre des substances létales au patient volontaire) et du suicide assisté (le soignant donne au malade qui le demande les moyens de mettre fin à ses jours). Mais la France est en retard. Autour d’elle, ses voisins ont déjà fait évoluer leur législation : les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg, l’Espagne, la Suisse, l’Autriche ou encore l’Italie autorisent l’euthanasie et/ou le suicide assisté. Patricia, Belge de 68 ans, a du mal à comprendre le retard de la France : « Les Français vont jusqu’en Belgique ou en Suisse pour mourir. La loi française doit évoluer. »

« On devrait pouvoir choisir sa fin de vie »

L’heure est indéniablement au changement. Si les opinions s’opposent, la légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté a déjà rallié de nombreux citoyens à sa cause. A 68 ans, Nicole estime que l’ « on devrait pouvoir choisir sa fin de vie. C’est humain comme réaction que de vouloir mourir à partir d’un certain moment ». Ayant vu, enfant, son grand-père mourir d’un cancer, elle pense souvent qu’il « aurait aimé avoir la chance de partir plus vite et souffrir moins ». Néanmoins, si beaucoup sont favorables à un élargissement de la loi, reste à déterminer jusqu’où. Thomas, 22 ans, est pour une totale liberté au recours au suicide assisté ou à l’euthanasie : « Au lieu de voir une personne enchaîner les tentatives de suicide, pourquoi ne pas respecter son choix ?» . Mais la plupart des interrogés souhaitent tout de même que des limites soient posées. Maryse, 56 ans, est « pour, mais avec des garde-fous : il faut que la personne soit en fin de vie, âgée ou atteinte d’une maladie incurable. Il ne doit plus y avoir aucune autre solution ».

Derrière la question de « l’aide active à mourir », se cache une problématique de société : le tabou de la mort. « Elle est vue comme quelque chose de mal » estime Benoît, écrivain âgé de 47 ans. « Il y a quelque chose de mystique dans son appréhension aujourd’hui. En réalité, la mort devrait être un droit naturel. Si la personne sent que c’est le moment de partir, il faut respecter son instinct ».

Une fois adopté en Conseil des ministres, le projet de loi fera l’objet d’un travail par une commission spéciale à l’Assemblée et au Sénat, avant de débuter les allers-retours de la navette parlementaire, à la recherche d’un compromis répondant aux attentes des Français. 

Colombe Laferté