A la suite de l’appel lancé par la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs, des rassemblements étaient prévus devant les Préfectures partout en France, ce mardi 22 octobre. Objectif : faire entendre leur détresse et demander au chef de l’Etat d’agir face aux difficultés qui rongent la profession. Que ce soit à Aix-en Provence, à Dijon ou à Metz, le mot d’ordre était le même : « Macron répond nous ! ». Les crispations sont nombreuses et le manque de réaction du gouvernement accentue un mécontentement déjà bien ancré.
La goutte d’eau qui a fait déborder le vase correspond au débat sur les zones de non-traitement (ZNT) contre le danger potentiel des pesticides. Débat enclenché par l’initiative d’arrêtés municipaux interdisant les épandages à une distance de 150 mètres des habitations. De ce fait, le gouvernement a lancé, début septembre, une consultation sur un projet d’arrêté. Rejetant l’idée d’une zone de 150 mètres, le pouvoir exécutif préconise des distances minimales de 5 à 10 mètres entre habitations et zones d’épandage. Pas assez pour les ONG et déjà bien trop pour les paysans. Selon eux, ces zones pourraient entraîner des pertes non négligeables à l’échelle des exploitations. Une consultation publique nationale a été ouverte, au sein de laquelle associations écologistes, citoyens craintifs pour leur santé et agriculteurs se déchirent. Cette discussion fait écho à une autre contestation : l’agribashing. Ce terme renvoie au dénigrement systématique dont le secteur serait victime, et qui proviendrait pêle-mêle des associations environnementales, des pouvoirs publics, voire d’une partie des consommateurs. Ce phénomène s’illustre notamment par l’augmentation des intrusions d’antispécistes, qui a triplé en un an. Bâtiments brûlés, images clandestines, le mouvement radical anti-viande monte en puissance et sème un climat anxiogène dans le milieu.
Ce mardi, avec leur pancarte « France veux tu encore de tes paysans ? », ils déploraient ce dénigrement permanent. Même si certains agriculteurs tempèrent l’ampleur de « l’agribashing ». Pour beaucoup, la priorité reste avant tout l’augmentation des revenus. De moins en moins de paysans arrivent à se verser un salaire décent à la fin du mois. Ils restent très disparates entre les secteurs, ne reflétant pas toujours la réalité. Un rapport de la Mutualité Sociale Agricole (MSA) révèle qu’un exploitant sur trois gagne moins de 350 euros par mois, moins que le RSA.
Un agriculteur se suicide chaque jour
La vague de suicide qui frappe cette profession atteste du malaise qui la ronge. Selon la MSA, un agriculteur se tue chaque jour. Le risque de suicide est 12% plus élevé que pour le reste de la population. La désertion de la profession illustre également la crise qui les frappe. Le nombre d’agriculteurs ne cesse de chuter : de 1,5 à 2% de chef d’exploitation en moins chaque année. En cause, notamment, l’extension des exploitations. Les petits agriculteurs font face à des géants de l’agroalimentaire, tout en étant sommés par la loi Alimentation de monter en gamme. Les distorsions de concurrence ouvertes par les accords de libre-échange comme le CETA, entraîneraient encore davantage de difficultés.
Ce n’est pas la première fois que les paysans battent le pavé. En un mois, c’est déjà la troisième fois que la FNSEA et les JA lancent une mobilisation d’ampleur touchant l’ensemble du territoire. Ce soulèvement fait écho aux « Feux de la colère » de septembre dernier ainsi qu’aux blocages de routes réalisés le 8 octobre. Le combat n’est donc pas près de s’arrêter.
Iris Bronner