© Tessa Jupon

Depuis la révélation de l’affaire Quatennens par le Canard Enchaîné le 14 septembre dernier, la scène politique est occupée par la cascade de scandales venue de l’alliance de la gauche. Après La France Insoumise (LFI), c’est le parti Europe Écologie Les Verts (EELV) qui voit ses troupes se diviser depuis les accusations concernant Julien Bayou. De nouvelles dénonciations qui ne laissent pas le collectif national #NousToutes sans voix. 

Depuis quelques semaines, la Nouvelle Union Populaire, Écologique et Sociale (NUPES) fait parler d’elle. Les affaires de violences conjugales concernant les responsables des partis LFI et EELV empourprent l’union des gauches. L’épouse d’Adrien Quatennens, coordinateur de LFI, a déposé une main courante à l’encontre de son époux qui lui aurait donné une gifle. Le député du Nord a rapidement choisi de se retirer de ses fonctions au sein du parti pour « protéger le mouvement, ses militants et toutes celles et ceux qui comptent beaucoup » sur lui.

Ce scandale a réveillé une bonne partie de la gauche, dont le leader des insoumis. Dans un tweet créant la polémique, Jean-Luc Mélenchon semble clairement soutenir son protégé. « […] Adrien décide de tout prendre sur lui. Je salue sa dignité et son courage. Je lui dis ma confiance et mon affection ». Quelques jours plus tard, sur le plateau de CNEWS, le député des Bouches-du-Rhône, Manuel Bompart a relancé le débat. « J'essaie de faire la part des choses : une gifle n'est jamais acceptable mais une gifle n'est pas égale à un homme qui bat sa femme tous les jours ». Cette réaction a entraîné une vague d’indignation de plusieurs personnalités, même au sein de son propre camp. Sur LCI, la députée EELV Sandrine Rousseau a en outre rappelé qu’ « une gifle à sa conjointe est un délit. […] C’est ça qu'il faut bouger parce que tous ces mots-là, ce sont des mots qui minimisent les actes ».

Dernière affaire en date, le secrétaire national d’EELV, Julien Bayou, a quitté ses fonctions le lundi 26 septembre. Accusé de violences commises contre son ex-compagne, le député parisien a également démissionné de la présidence de son groupe à l’Assemblée.

Mina Rigal, coordinatrice nationale du collectif féministe national #NousToutes explique que le travail de prévention et de sanction des actes de violence conjugale est encore important. Bénévole engagée dans cet organisme qui lutte contre les violences sexistes et sexuelles touchant les femmes et les enfants, elle nous livre son analyse.

Quelle a été votre réaction en découvrant les affaires de violences conjugales au sein de la NUPES ?

« Je ne pourrais pas dire que j’ai été étonnée ou surprise, mais évidemment que ça m’a fait quelque chose. Il faut bien se rendre compte que les violences sont systémiques, elles sont partout dans la société. On se rend compte que des hommes violents peuvent être très proches de nous mais aussi des gens dont on pense que la moralité et les opinions politiques les rendent totalement dénués de violence ».

Selon vous, ces affaires auront-elles un impact sur l’image du parti de la NUPES ?

« On voit déjà l’impact. Une partie du message du parti est décrédibilisée. Ces affaires pointent certaines incohérences de la gauche. Quand on se dit féministe et qu’on veut défendre ces sujets c’est bien mais quand c’est un camarade avec qui on milite qui est accusé, on a des propos très différents ». 

Que pensez-vous de la réponse de Jean-Luc Mélenchon sur Twitter après la révélation de l’affaire Quatennens ? 

« Son tweet m’a vraiment choquée. On ne peut pas se targuer d’être à la tête d’un mouvement féministe quand on a aussi peu de considérations pour les violences conjugales. Dans son tweet, il n’y a même pas un mot pour les victimes. Le problème des politiques est qu’ils ont une grande audience. Et les propos de Mélenchon concernant la malveillance policière et le voyeurisme des médias ne sont pas entendables en 2022. Je suis également choquée par les propos de Manuel Bompart sur le plateau de CNEWS. Oui, une gifle est une violence conjugale. Il y a un continuum des violences. Les femmes doivent se rendre compte que la violence arrive bien avant le premier coup. On ne devrait plus avoir à le dire en 2022 ».

Les commissions internes des partis politiques sont-elles assez efficaces pour mettre en place des sanctions ?

« C’est très peu utile puisque dès que les violences conjugales touchent des hauts cadres, rien ne se met en place. Quand on voit l’affaire de Julien Bayou, on remarque bien le problème. La commission a été saisie depuis le mois de juin. Ces commissions auraient dû faire un travail bien avant fin septembre ».

Selon vous, le milieu de la politique est-il particulièrement concerné par les violences conjugales ou sont-elles juste plus médiatisées ?

« Les violences sexistes et sexuelles en général, c’est un problème sociétal et systémique. On grandit et on évolue tous dans un système qui s’appelle le patriarcat. Un système plein de ramifications. Quand une victime parle, on a tendance à minimiser les violences qu’elle subit. Considérer qu’une gifle n’est pas une violence conjugale revient au même. C’est toutes ces choses-là qui montrent bien que le milieu politique n’est pas à part de la société, c’est un milieu autant touché que les autres ». 

Tessa Jupon