© Damien Frossard
Sorti en 2011 le film Cars 2 propose un savoureux mélange qui parvient à faire rimer voitures anthropomorphisées, agents secrets et dénonciation d’un des écueils modernes du capitalisme : le green-washing.
Le deuxième film des studios Pixar consacré à la franchise Cars surprend le spectateur d’entrée de jeu. Voitures-agents secrets, Flash McQueen relégué au second plan en faveur de Martin la dépanneuse et discours écologique. Voilà autant d’éléments qui déstabiliseront les passionnés de voitures aux couleurs fluos s’affrontant sur le circuit de la Piston Cup. L’amateur de tons vifs ne sera cependant pas en reste, le logo de l’allinol devrait lui sauter aux yeux avec son bleu ciel et son vert clair. Ce choix de couleurs n’est pas anodin, il semble même logique puisqu’il s’agit d’un carburant propre. Quoi de plus naturel alors que de choisir du vert et une feuille ? Il s’agit d’un détail mais on sent déjà poindre une note d’ironie de la part du studio américain.
Ce carburant qui se veut vert ne l’est en réalité pas tant que cela. Miles Axlerod, milliardaire philanthrope qui prétend agir pour le bien commun et en faveur de la défense de l’environnement, a trafiqué son allinol. En laissant penser que les éco-carburants sont dangereux il espère pouvoir profiter du gisement de pétrole qu’il a découvert et continuer à vendre de l’essence. Il entreprend même de mentir sur son moteur, le déclarant totalement électrique. Ce n’est pas sans rappeler le scandale qui a ébranlé Volkswagen en 2015. La marque de voiture allemande avait équipé ses moteurs diesels d’un logiciel trompeur qui permettait de dissimuler la véritable quantité de particules polluantes émises par les véhicules. C’est au total plus de 11 millions de voitures truquées qui furent vendues à travers le monde.
Ce que fait Miles Axlerod, tout comme Volkswagen, n’est rien d’autre que du green-washing, ou de l’éco-blanchiment en français. Il s’agit d’une méthode de marketing qui vise à valoriser l’image d’une marque en mettant en avant un engagement écologique mensonger ou inférieur à ce qu’il est vraiment. Cette pratique se manifeste notamment par l’utilisation excessive du vert ou de visuels évocateurs de la nature. Une leçon qu’Axlerod semble avoir assimilée parfaitement. Véritable fléau, l’éco-blanchiment est une pratique illégale qui s’assimile souvent à de la publicité mensongère. L’ARPP (Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité) recommande que le message publicitaire d’une marque soit proportionnel aux efforts effectivement réalisés par la marque. Ce même organisme indique également que les marques ne doivent pas induire en erreur le consommateur.
Effectivement, c’est bien là que se trouve le principal danger du green-washing. Axlerod est un précurseur dans son domaine : si les produits prétendument verts sont dangereux, à quoi bon en consommer ? Cette technique de marketing a pour effet d’introduire le doute et la méfiance dans l’esprit des consommateurs. Ils peuvent être tentés de rejeter les produits propres, comme l’imaginait le milliardaire anglais dans Cars 2, ou alors ils peuvent surconsommer un bien qui n’est pas aussi respectueux de l’environnement qu’il le prétend.
Derrière un tour du monde à toute vitesse et une parodie de films de genre, la production de Pixar nous propose une réflexion sur les dangers et les conséquences du green-washing. Les entreprises ont plus de pouvoir que les consommateurs et si elles ne jouent pas leur rôle dans la lutte contre la crise climatique, alors les efforts de chacun au quotidien sont vains. Il ne suffit pas d’enjoliver la réalité ou de mentir, il est important d’agir. L’exemple de Miles Axlerod est assez clair : derrière des voitures électriques se cache parfois un milliardaire prétendument philanthrope qui rêve d’atteindre les étoiles, avec ou sans énergie verte.